Impossible de pouvoir passer à côté d’un film du duo Cattet/Forzani. Bête (à deux têtes) de festivals, « LAISSEZ BRONZER LES CADAVRES » a été très remarqué durant le Festival de Locarno et celui de Toronto en septembre dernier. Amplement mérité, vu l’audace formelle dont font preuve film après film, les réalisateurs fétichistes des très accomplis « Amer » et « L’Etrange Couleur des Larmes de Ton Corps ». Si leurs deux premiers films étaient pour le moins mystérieux, celui-ci de par le fait qu’il est une adaptation d’un roman noir culte écrit par Jean-Patrick Manchette, promettait un film bien plus abordable pour le grand public.


Mais c’est mal connaître le duo. Quoiqu’il fasse, Cattet/Forzani, c’est avant tout une forme. Et « Laissez Bronzer les Cadavres » ne dévie pas d’un poil de cette affirmation. Là, où l’on était en droit d’attendre un style plus « classique », le duo en profite au contraire pour pousser toujours un peu plus loin ses obsessions fétichistes délaissant ici les lames pour les armes à feu. C’est violent, percutant et terriblement « arty ».


Polar esthétisant au possible et filmé sous un soleil de plomb, « Laissez Bronzer les Cadavres » est une expérience cinématographique qui voit quatre braqueurs se réfugier dans un village abandonné ou réside un artiste en manque d’inspiration. De ce constat pourtant simple, les réalisateurs arrivent à exploser le tout dans un déchaînement fantasmatique rarement vu au cinéma.


Malgré tout, la vision hallucinatoire des réalisateurs a ses limites et comme leurs précédents films, il faudra vous accrocher pour escalader la falaise où le village abandonné semble perché. Ici, le plaisir se mérite. Tout comme les protagonistes du film, il faudra donner pour recevoir. Et ce n’est pas de tout repos.


La démarche pourrait paraître prétentieuse, hautaine si elle n’était pas jumelée à un vrai amour de cinéma. Ce n’est pas du « arty » artificiel ou de posture comme on en trouve trop souvent dans le cinéma dit de « l’exception culturelle ».


Produit une nouvelle fois par Eve Commenge et François Cognard (Tobina Film), ce dernier est un « ex-Starfix Mag » aux côtés des cinéastes Christophe Gans et Nicolas Boukhrief et de par sa participation, LES CADAVRES est la garantie d’un cinéma de genre à la fois exigeant et passionné, sans commune mesure en France.


Cattet/Forzani, c’est une marque déposée. Oubliez les intrigues et la narration et faite place à la sensation à la fois visuel et sonore dont le travail est finalement proche d’un ASMR (Autonomous Sensory Meridian Response) mais dont le résultat sur le corps et le mental est bien différent.
Tels des alchimistes, les cinéastes expérimentent, tordent, déforment la matière pour délivrer une pellicule épidermique incandescente dont les images à la fois fugaces et envoûtantes viendront vous hanter pour un long moment.

Tirry
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le 17 oct. 2017

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