Mutter Iceland
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Une intrigue scénaristique conçue sobrement, classique du genre, autour de plans fixes se succédant, au format scope, plans panoramiques, contrastant avec le paysage imprégné de montagne, escarpé, traité en verticales, étouffant et ne laissant pas d’échappatoire et de respiration au spectateur.
Davantage sensible à l’image et au son qu’au scénario, par ma sensibilité, ma profession et mon rapport à l’image, l’ambiance visuelle se crée par la nature sublimée, au sens où elle représente à la fois pour le spectateur une forte prégnance attirante et un danger qui le menace constamment. Le son, menaçante présence dans le silence des images, élégant, minimal, inquiète et participe de l’inconfort que peut générer les actions.
Le décor, tantôt intérieur dans cette ferme isolée d’agriculteurs, aux cadres, contours, délimitations et fenêtres récurants, tantôt extérieur, balayés par une dominante colorée aux tons froids, l’opacité du brouillard et le vent, leitmotiv chez Bela Tarr, producteur du film, plongent le spectateur dans une inquiétante ambiance, où, au fur et à mesure, l’espoir et le « happy end » disparaissent.
Lamb, convaincant dans son rôle de petit mutant fragile et menacé, (je ne rentrerai pas dans les partis-pris spécistes ou anti-), Maria, interprétée avec force par Noomi Rapace, aussi forte que la nature froide et aride, et son mari dont le jeu paraît bien pâle.
La bête, dévoilée au dénouement en quelques plans rapides (Etait-ce vraiment nécessaire de la montrer ? D’apporter et d’imposer des réponses au spectateur? ) dont on comprend le lien viscéral avec la nature et sa beauté ineffable mais aussi son effroyable menace pour l’humain, disparait comme elle est venue. Le film s’ouvre sur l’omniprésence de la bête (mais son absence physique à l’écran) amenée par un plan plongé dans le brouillard épais et dont on devine le danger par la bande son illustrant la créature monstrueuse en rut, dotée d’une force sans équivalence face à un homme bien fragile et ténu qui tente de s’approcher. La bête, féroce, sauvage, comme le paysage dans lequel elle évolue, a la faiblesse de ne pas pouvoir entrer dans les bâtiments d’habitation du couple de fermiers mais ne peut accéder qu’à l’étable, comme si la maison du couple était protégée de toute entité déviante, du diable? On sent peut-être un intérêt pour le réalisateur de pointer du doigt, de manière subtile, un rapport au sens sacrificiel, avec la petite brebis mi-fillette mi-animal, et un rapport distancié avec la question de l’Incarnation divine.
La fascination opérée par ce film se fait, pour moi, dans les infimes détails visuels dissimulés et observables de manière furtive dans différents plans et qui permettent de construire l’intrigue et fonctionne comme indice ou avertissement du danger implicite qui menace la ferme; des tableaux, peintures d’animaux, tantôt fantastique, tantôt réels, des reflets, dont la distorsion physique des acteurs et de la nature, renforce l’approche du fantastique, des photographies dispersées sur les commodes ou une table, de la défunte fillette « Ada », accompagnée d’une brebis ou de son chat.
Créée
le 9 janv. 2022
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