Durant la Première Guerre Mondiale, par le biais des petites annonces (l'ancêtre de Meetic), Henri Désiré Landru rencontre plusieurs femmes. Qu'il invitait dans sa maison de campagne et qu'il tuait ensuite, et ce durant plusieurs années. jusqu'en 1919 précisément où il sera incarcéré puis guillotiné trois ans plus tard.
Évacuons tout de suite le format (carré) de l'image ainsi que son manque de moyens, car j'ai été surpris d'apprendre que Landru était au départ un téléfilm, passé donc à l'ORTF, et que son succès l'a poussé à une sortie en salles après-coup. Ce qui est bienheureux quand on y pense, car Claude Chabrol, accompagné de Françoise Sagan aux dialogues, propose un film d'une grande perversité, où Charles Denner, dans le rôle-titre, apporte lui aussi son lot d’ambiguïtés.
D'ailleurs, il y a quelque de chose de très classe, avec les guillemets de rigueur, quand on voit que trois de ses victimes sont jouées par Danièle Darrieux, Michèle Morgan et Stéphane Audran, lesquelles ne semblent pas se douter du piège fatal qui les attend, qu'on aperçoit juste sur un plan, un mouchoir ensanglanté. Le (télé)film ne rentre pas dans la psyché du personnage, mais à l'aide d'archives de la guerre, où on aperçoit notamment le Maréchal Pétain, le réalisateur essaie peut-être de lui donner une sorte de justification de ses actes.
Quand à la mise en scène, même s'il y a beaucoup de plans, et semble parfois donner l'impression d'être dans une pièce de théatre, le film est coloré, en contraste avec sa noirceur, et toute la dernière partie, consacrée au procès puis à l'exécution, est passionnante, avec notamment un plan de coupe formidable où Landru sort de sa cellule pour se diriger vers l'échafaud, avec un travelling horizontal.
Même s'il n'y pas la participation de Paul Gégauff au scénario, Chabrol avait conscience de filmer un monstre d'une grande perversité, qui passait pour Monsieur Tout-le-monde, et que Charles Denner, malgré son maquillage et ses postiches, joue très bien.