On savait Jan-Ole Gerster réalisateur brillant depuis son premier long-métrage Oh Boy. Lara Jenkins n'infirme pas le sentiment mais son cinéma semble tellement privilégier l'aspect cérébral, quelque part entre Haneke et Trier, qu'il en devient presque glacé et dénué d'émotion malgré la partition impeccable et impressionnante de son actrice principale, la très peu connue (en France) Corinna Harfouch. Le film suit Lara Jenkins durant une journée particulière, celle de son 60ème anniversaire, et commence avec une scène où avant même de faire connaissance avec la susdite, celle-ci est à deux doigts de disparaître pour de bon de l'écran. C'est clair : Gerster n'est pas là pour amuser la galerie S'ensuivent tout un tas de pérégrinations de la sexagénaire dans Berlin alors que son fils va peut-être accéder à la gloire, à l'issue d'un concert consacré à sa première composition. Lara ne s'aime pas et n'est guère appréciée des autres, elle est froide, cassante, péremptoire ... D'où vient ce caractère acariâtre jusqu'à cette jalousie envers son fils ? Le film prend son temps pour nous donner la réponse définitive qui, il est vrai, donne lieu à une dernière scène spectaculaire, enfin porteuse d'émotion. C'est entendu, Gerster est très doué, son film à combustion lente est excellemment écrit et dirigé mais il y a, comme souvent chez certain cinéaste autrichien, l'impression d'être manipulé avec la révélation d'éléments qui auraient pu être dévoilés bien plus tôt. Mais dans ce cas, il n'y aurait pas eu ce jeu intellectuel et un peu cruel qui consiste à décortiquer une âme égarée et à évoquer une vie ratée faute d'avoir eu la clairvoyance ou le courage de croire en son étoile.