... and dirty, and yet it is heroic to go spill guts and blood in the most ghastly manner in the name of humanity."
Le portrait (qu'il soit partiel, biaisé, voire maladroit) des États-Unis réalisé par des cinéastes étrangers ayant intégré le pays sur le tard me fascine toujours autant, le plus symbolique d'entre eux étant peut-être à mes yeux quelqu'un comme Paul Verhoeven (Starship Troopers, RoboCop, Total Recall, Showgirls vont dans ce sens). Il me reste encore quelques films à découvrir chez Miloš Forman pour compléter le tour d'horizon mais je pense que The People VS. Larry Flynt est sans doute le meilleur représentant de cette thématique en s'attachant à raconter l'histoire du fondateur du magazine pornographique Hustler — je ne connaissais pas bien la différence avec Playboy par exemple mais visiblement Hustler a creusé un sillon beaucoup plus provocateur, tant dans ce qui était montré (nudité frontale avec vagin) que dans l'humour idiot. Comme le dira un personnage au creux d'un jeu de mots d'un goût particulier, "The reign of Christian terror is over. We're going back to our roots. We are porn again". Je ne connaissais pas bien ce personnage de Larry Flynt, et on peut parier de manière à peu près certaine qu'il n'était pas aussi "sympathique" que ce que la composition de Woody Harrelson laisse supposer, mais le film raconte néanmoins tout un pan assez intéressant de la culture états-unienne.
Il y a beaucoup de gras dans un tel film, calibré pour une audience très large : tout ce qui a trait à l'enfance misérable de Larry, à la transformation physique de sa femme (incarnée avec beaucoup d'implication par Courtney Love) atteinte du sida, et bon nombre des interventions de son avocat (un tout jeune Edward Norton, à l'aube des films qui le rendront célèbres comme American History X (1998), Fight Club (1999) ou encore La 25ème heure en 2002) me paraît largement superflu. À l'inverse, on peut regretter le maniement extrême de l'ellipse dans le scénario, car Larry passe du statut de créateur d'une revue licencieuse marginale à celui de multi-millionnaire et véritable magnat en l'espace de 5 minutes.
Malgré toutes ces réserves, je garde toujours un certain plaisir à voir éclore ce genre de personnage, très représentatif de la culture nord-américaine, au milieu d'un environnement grandement hostile et puritain qui voit d'un très mauvais œil cet étalage d'obscénités en tous genres. Cela illustre assez bien l'image de ce pays et de ses extrêmes en matière d'affichage de vertus, avec d'un côté la sainteté du premier amendement et de l'autre la pureté héritée de la religion. Cela n'en fait pas pour autant un personnage appréciable, avec une dose extrême de mépris et d'arrivisme, on en vient à questionner le degré de sincérité dans son combat contre l'ordre moral. Un combat largement romancé, décousu, mettant en scène une sorte de clown d'envergure. On peut établir ici une filiation avec son Amadeus 12 ans auparavant, dans le portrait d'une autre excentricité iconoclaste, avec tout de même une évolution notable dans le style de Forman.
J'aurais bien aimé voir le film déborder un peu plus du carcan du biopic hollywoodien, avec un schéma différent du rise & fall suivi de l'inévitable rédemption, et en un sens se rapprocher du côté troll de Man on the Moon qu'il avait consacré au personnage de Andy Kaufman (avec Jim Carrey dans le rôle principal). Détail amusant, à l'époque de la sortie du film l'identité du tireur qui rendit Flynt paraplégique et impuissant n'était pas connu. Dans un registre beaucoup plus personnel, je mets fin à des années, si ce n'est des décennies, de confusion dyslexique entre plusieurs titres de films, Barry Lyndon, Barfly, et Larry Flynt : ça y est, je les ai enfin tous vus.
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