Sommet indépassable du film noir, Laura est un modèle de perfection tellement évident qu'il semble presque difficile d'en étaler les inombrables qualités aux yeux des chançards qui vont pouvoir le découvrir dès que possible.

Tout semble réuni ici pour justifier à jamais son aura de classique indémodable, alors, que, un peu à l'instar d'un Casablanca par exemple, rien ne semblait l'y prédisposer lors de sa production.

Le producteur Preminger qui remplace Mamoulian à la mise en scène et doit tout reprendre à zéro, un Zanuck réticent, une Gene Tierney comme dernier choix faute de mieux, un Clifton Webb sorti du formol pour l'occasion et imposé de force, un directeur de la photographie débutant, un héros de seconde zone, voici quelques exemples bien loin d'un tournage idéal, et pourtant...

Loin de la mollesse d'un Mamoulian, Preminger impose d'emblée une maîtrise étourdissante, Joseph LaShelle recevra un oscar pour sa photographie magnifique, Clifton trouvera ici à la fois une nomination à l'oscar, le rôle de sa vie et l'occasion de proposer un des plus grand personnages du film noir. Gene Tierney s'impose comme une des plus belles femmes du monde et devient malgré elle un mythe universel dans le rôle de cette femme de rêve assassinée qui entraîne l'enquête donnant lieu au film. En enquêteur buté qui tombe amoureux de Laura morte, Dana Andrews est magistral et sert de contrepoint parfait à la virtuosité de Webb ou à la viscosité de Vincent Price, l'ex fiancé flirtant avec le gigolisme...

Sans jamais utiliser d'artifices grossiers, Preminger fait montre d'une virtuosité à toute épreuve, l'atmosphère si caractéristique du film lui doit presque tout. A la limite du fantastique, vaporeuse parfois mais toujours prête à redevenir tranchante comme un rasoir, celle-ci est la raison principale du culte qui entoure cette oeuvre... Une atmosphère bien entendue magnifiée par le thème musical de David Raksin, obsédant et bouleversant comme devait être la femme qui lui en inspira cruellement la composition, comme devait l'être aussi Laura, beauté parfaite qui ensorcela littéralement son entourage jusqu'à ce dénouement tragique, inéluctable.
Torpenn
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le 17 févr. 2012

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Torpenn

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