On le sait, on le sent.
Dolan a mis une part de lui-même dans ce projet.
Preuve d'une maturité qui ne cessera de bluffer les cinéphiles du monde entier, "Laurence Anyways" est l'illustration complète mais pas totalement aboutie de la patte du prodige québécois.
Mais à trop le vouloir personnel, le film en devient abscons.
Les accusations de prétention souvent attribuées (à mon sens à tort) à son auteur viennent peut être de ce sentiment de "laissage de côté". Le spectateur semble un intrus, une présence gênante à l'élaboration du film. On ne comprend pas les personnages, leur but, leurs dialogues (pourtant extrêmement bien écrits)...
Que veut ce film ?
L'esthétique est remarquable ; qu'elle nous plaise ou non on ne peut que s'agenouiller face à un tel sens de la photographie, du cadre, de la couleur, de la lumière...
Trop poussée, littéralement saoulante et fatigante, celle-ci tend à certains moments à transformer le film en clip géant.
Comme tout Dolan, la musique a une place première, et couvre tout, tout le temps. A un tel point que, sur presque trois trop longues heures, on en vient à savourer les moments de silence, toujours furtifs et alourdis de non dits.
Le propos est très étrangement traité, mais heureusement le film n'est jamais plaidoyer. Dolan sait parler de ce qui lui est cher, développer son opinion sans assommer le spectateur, le forcer à aller dans son sens et heureusement sans jamais délaisser sa matière première qu'est le cinéma.
Oscillant entre grand n'importe quoi et délicieuse histoire d'amour rocambolesque et extravagante, entre overdose d'esthétisme et dosage parfait, entre longueurs pesantes et scènes bousculées, le film emprunte tous les chemins, même les plus fous, même les plus incompréhensibles, même les moins efficaces et finit par nous perdre petit à petit.
Palette démesurée et déséquilibréedes talents de l'artiste, "Laurence Anyways" résulte pourtant d'une originalité, d'une pugnacité et d'un amour du cinéma intrinsèque qui ne peut que prêter à l'admiration.