A l’occasion de la venue exceptionnelle de Kim Jee-woon et de Song Kang-ho au Festival du Film Coréen à Paris, j’ai enfin pu découvrir Bon, La Brute et le Cinglé, film qu’il me fallait voir depuis un bon moment déjà. Un hommage à peine camouflé au classique de Sergio Leone, même si le film de Kim Jee-woon prend un virage stylistique radicalement différent.
Il faut peu de temps au film de Kim Jee-woon pour imposer son rythme. Ça va régler des comptes à tout va, et ça va tirer et exploser dans tous les sens. Une folle chasse au trésor va réunir les trois hommes, chacun correspondant à l’un des trois qualificatifs donnés dans le titre. Trois hommes qui n’ont a priori aucun véritable lien, hormis la quête de cette fameuse carte indiquant l’emplacement d’un trésor, détenue par le cinglé, Tae-goo. Naturellement, la situation est plus complexe que cela.
Cette folle quête va être le théâtre d’affrontements rocambolesques et de folles situations, qui font tout le charme de ce Bon, La Brute et Le Cinglé. Mélangez du Leone, du John Ford, du Tsui Hark et Mad Max, et vous obtenez Le Bon, La Brute, Le Cinglé. Kim Jee-woon avait, en présentant le film, qualifié son film de « western kimchi », établissant un parallèle avec les « western spaghetti », et le qualificatif est en effet assez évocateur, avec ce côté épicé et énergique qui caractérise le film. Les personnages et les plans iconiques issus des Leone, les grands espaces de John Ford, le rythme et la mise en scène intelligente et inventive de l’action dans la lignée d’un Tsui Hark, des courses-poursuite qui nous rappellent au bon souvenir des Mad Max, les références et les parallèles sont nombreux, mais ils n’écrasent jamais le film.
Car Le Bon, La Brute et Le Cinglé suit son propre itinéraire, il tire le meilleur de ses références sans jamais chercher à s’appuyer dessus outre mesure. Ses personnages, incarnés par trois acteurs emblématiques et parfaitement choisis, suivent aussi leurs propres chemins dans ces vastes étendues mandchoues. L’un convoite la richesse, l’autre est en quête de vengeance, et le dernier incarne la justice. Chacun a des motivations compréhensibles, humaines, montrant la propension des Hommes à souvent se donner corps et âmes dans l’accomplissement d’une mission ou dans l’atteinte d’un objectif, sans même savoir, finalement, de quoi il en tient réellement.
Kim Jee-woon propose, avec Le Bon, La Brute et Le Cinglé, un film explosif, énergique et jouissif, qui limite les temps morts pour proposer un divertissement de grande ampleur, qui s’assume comme tel, n’hésitant pas à être presque kitsch, mais n’étant jamais ridicule. Le film atteint certainement son sommet lors d’une course-poursuite grandiose qui intervient vers la fin du film, impressionnant et spectaculaire moment d’action qui témoigne aussi de toute l’ambition dont il a été fait preuve dans sa réalisation. Généreux, fantasque, énergique, Le Bon, La Brute et Le Cinglé est une aventure hors-normes dans les grands espaces de l’Extrême Orient.
Critique écrite pour A la rencontre du Septième Art