Le dernier sera le boss
Après deux films situés à Milan, Fernando Di Leo prend la direction de Palerme et parle ouvertement de « mafia ». Comme dans les deux premiers opus de ce qu’on appellera a posteriori comme la...
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le 15 juin 2024
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Après deux films situés à Milan, Fernando Di Leo prend la direction de Palerme et parle ouvertement de « mafia ». Comme dans les deux premiers opus de ce qu’on appellera a posteriori comme la Trilogie du Milieu, il s’intéresse à un personnage de second plan dans l’organisation et montre comment il évolue au sein de celle-ci. Après celui d’Ugo Piazza qui jouait malignement double-jeu puis de Luca Canali qui n’était qu’un pion dans un jeu qui le dépassait, Fernando Di Leo se penche sur le cas de Nick Lanzetta, un tueur à gages qui tente de miser sur le bon cheval en changeant de chef et qui finit par comprendre qu’il est seul et va devoir lui-même devenir calife à la place du calife s’il veut survivre. Le scénario (qui est l’adaptation d’un roman américain alors que les deux films précédents s’inspiraient de l’univers littéraire de Giorgio Scerbanenco) est typique des films de mafia. Des bandes rivales s’affrontent et il s’ensuit une escalade de la violence où chacun va tenter de sauver sa peau. Les alliances se font et se défont au gré des différents rebondissements tandis que les cadavres s’amoncellent.
Avec ce film, Fernando Di Leo confirme le peu de sympathie que lui inspire la mafia. Du chef de clan au petit homme de main, aucun personnage n’inspire confiance et n’obtient grâce à ses yeux. Bien loin de l’image romanesque et surtout romantique qu’en donne le cinéma américain qui vient de sortir Le Parrain l’année précédente, le cinéma italien n’exprime que répugnance à l’égard du crime organisé. D’un clan à l’autre, les hommes ne sont que l’incarnation de la trahison, même à l’endroit de leurs amis de toujours. Personne n’est fiable et tous les personnages sont humainement détestables. Par ailleurs, le réalisateur (qui s’était très peu intéressé jusque-là aux membres des forces de l’ordre) dresse un tableau particulièrement noir de la police mais aussi des hommes de loi avec ici un avocat particulièrement influent qui fait le lien entre les différentes familles. Les policiers sont dans le film tous de mèche avec la mafia et ils sont eux-mêmes au service de politiciens corrompus. La charge de Di Leo est sans équivoque et rend l’image du crime organisé encore plus dangereuse et détestable. À ce titre, à sa sortie, Giovanni Gioia, plusieurs fois ministre, croyant se reconnaître dans un des personnages du film, intenta des poursuites envers Di Leo. Une action qui en dit long sur l’innocence de l’individu en question. Cerise sur le gâteau de cette noirceur ambiante, le réalisateur a fait le choix de conserver à Palerme la même lumière blafarde qui règne à Milan. Par ailleurs, difficile de reconnaître Palerme tant la ville est volontairement mal mise à son avantage.
Quant à l’image de la femme, elle est de toute évidence encore plus déplorable que dans les premiers volets de la trilogie. Elle n’est, en effet, plus seulement une image sexuée mais est la représentation de la plus pure dépravation. Le seul personnage féminin du film est celui de Rina, la fille d’un des cadors de la mafia, qui se révèle être une nymphomane droguée qui s’offre à qui lui donne ce qu’elle attend d’un homme. Son personnage est d’autant plus immoral qu’elle tombe dans les bras de ceux qui veulent ou ont eu la peau de leur père. Pas certain qu’avec ce personnage, le cinéma de Di Leo gagne en audience auprès des féministes.
Le résultat de ce sombre tableau fait, en tout cas, une nouvelle fois mouche. Tout le talent de Di Leo dans les scènes clés du film (notamment une ouverture habilement conduite qui voit notre tueur à gages faire sauter à la grenade les membres d’une famille ennemie se gargariser devant un film pornographique qu’ils regardent dans une salle de projection privée) rend l’ensemble d’une évidente efficacité. La musique aux petits oignons de Luis Bacalov et l’interprétation convaincante de tous ses interprètes (Ricard Conte, bien entendu, en tête) contribuent à en faire une pièce très estimable de cette trilogie qui est une des pierres angulaires du cinéma policier italien.
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le 15 juin 2024
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