Ah, ma reine... A quoi t'attendais-tu ? Surtout venant d'une suite de Blanche Neige et le Chasseur ? A de l'originalité, à du jamais vu ? Simplement à un joli spectacle ?
Je crains qu'il ne faille revoir tes ambitions, ma reine, même si je l'avoue, Le Chasseur et la Reine des Glaces se tient plutôt bien dans son premier quart d'heure. Mais ensuite, je ne crains que tu sois très déçue, car le film que tu comptes voir sombre ensuite lentement. Il se jouera même de toi, en utilisant une pirouette scénaristique toute moisie pour ramener un personnage à la vie. Au point que tu te sentiras sans doute trahie et insultée dans ta royale intelligence. Mais par ce vil et grossier subterfuge, le film se tirera aussi une flèche dans le pied, tant il démolit l'essence du chasseur ainsi que son passé ténébreux et meurtri. Et son charisme aussi, car il mordra systématiquement la poussière dans ses duels et aura toujours besoin de quelqu'un pour le tirer d'affaires. Triste constat pour votre royale altesse.
Tu seras aussi déçue, ma reine, car cette suite hésite constamment entre une dark fantasy adulte et boueuse tenant pas trop mal la route et une embarrassante mièvrerie sur le pouvoir de l'amour, pouvoir vanté à longueur de dialogues nouilles qui te consterneront certainement. Tu auras aussi droit à de sots badinages amoureux et à l'envolée féministe de rigueur, dans un "c'est moi qui choisis !" hors sujet. Mais surtout, tu ne pourras pas échapper à un humour crétin et déplacé, qui t'apprendra qu'une plante, je ne sais plus laquelle, oh misère, peut soigner les hémorroïdes (...) et au fait qu'une partie de l'aventure est animée par des naines pilleuses de tombes lubriques (pour l'une, du moins) et bêtasses (pour l'autre) qui ne servent finalement à rien.
De telles scories d'écriture ne seront rien à côté de la bêtise du scénario ou du fait que la reine des glaces s'invite de manière maladroite dans l'aventure de la recherche du miroir, comme un cheveu sur la soupe. Ou encore du fait qu'au final, le film semble manger à tous les râteliers, entre le conte et la fantasy. Sauf que le Présssieux qui murmure, qui brille et qu'il y a des écritures dessus, eh bien, c'est un plat à paella king size doré, tandis que le bestiaire, peu original, se résume à un singe numérique dupliqué et à une sorte de petit ours que chevauche la reine des glaces. Pas de quoi chanter ♫ Libérée, Délivrée ♪ pour l'esprit créatif, si tu veux mon avis...
Reste la beauté de certains décors et costumes qui vous raviront sans doute, ma reine, ainsi que le duel final. Mais surtout, ce sera cette confrontation entre Ravenna et sa soeur, qui renoue in extremis avec la noirceur et la cruauté d'un conte qui aurait été écrit par quelque sujet de votre royaume, comme les frères Grimm. Le malsain s'invite enfin, mais hélas trop tard pour racheter Le Chasseur et la Reine des Glaces de ses pêchés originels.
Tu te dis certainement, ma reine, que le casting vingt quatre carats pourra te distraire. Mais sache qu'il marche en mode économie d'énergie : Chris est falot, Jessica virevolte par cascadeur interposé et roucoule (pourtant, c'est elle la féministe !) et Charlize sort tout droit de ses pubs pour Dior (J'adore !). Seule Emily insuffle quelque chose, comme une légère émotion glacée, un semblant de blessure. Elle est jolie aussi, Emily, mais je vous rassure, ma reine, sa beauté est loin d'égaler la vôtre.
C'était bien ça la question, non ?
Behind_the_Mask, qui rit de se voir si beau en ce miroir.