Nouveau long métrage de Marco Berger, référence du cinéma gay argentin, Le Colocataire raconte l'histoire d'amour clandestine de deux beaux gosses dans un Buenos Aires populaire. Passé maître en quelques années dans l'homoérotisme, le réalisateur signe ici ce qui est sans doute son oeuvre la plus aboutie à ce jour.
Si Hawaï et Taekwondo m'ont quelque peu laissé sur ma faim, Le Colocataire m'a nettement plus convaincu. On y retrouve tout ce qui fait le style de Marco Berger: des regards qui en disent long et des plans complaisants sur le physique avantageux des acteurs... Mais contrairement aux précédents opus, le film ne se contente pas d'exprimer les non-dits, le désir et la tension sexuelle. Les protagonistes passent à l'acte et vivent une histoire d'amour charnelle.
Tout semble opposer les deux personnages, si ce n'est qu'ils habitent sous le même toit, travaillent dans la même menuiserie et aiment boire des bières. Gabriel (Gastón Re), le blond taiseux, lit des nouvelles de Ray Bradbury seul dans sa chambre, tandis que Juan (Alfonso Barón), le brun bavard, aime parler foot avec ses potes. Le premier, malgré son jeune âge, est déjà veuf et papa d'une petite fille qui vit chez les grands parents. Le second enchaîne les aventures féminines et rêve de fonder un foyer. Pourtant, la promiscuité aidant, leur attirance l'un pour l'autre ne tarde pas à se faire jour.
Très différents, les deux hommes vivront une histoire aussi secrète que compliquée. Gabriel subit ce qu'il faut bien appeler les trahisons de Juan. Ce dernier ne veut surtout pas passer pour un "pédé" auprès de ses copains et ne renonce pas à une aventure parallèle avec sa petite amie. De fait, le film revêt une dimension sociale en traitant finement de la difficulté de vivre son homosexualité en Argentine, un pays certes gay-friendly mais marqué par une culture latine et macho.
La fin est prévisible mais la toute dernière scène est rayonnante d'espoir, laissant entrevoir un changement d'attitude vis à vis de l'homosexualité dans la nouvelle génération, personnifiée dans la fille de Gabriel.
Pudique et touchant, servi par de superbes images et empreint d'une grande sensibilité, Le Colocataire a de quoi s'imposer comme l'un des meilleurs films gay de ces dernières années. On en redemande !