Premier Bernardo Bertolucci pour moi, et constat assez déconcertant. D'un côté, difficile de ne pas être ébloui par la beauté glaçante de la réalisation et par une exploitation exceptionnelle des décors, quasiment chaque plan appelant au vertige du spectateur. Ne serait-ce que pour cela, difficile de lâcher l'image du regard tant l'expérience est intense et même assez unique. De l'autre, le sujet a beau être passionnant (l'itinéraire d'un fasciste obsédé par un souvenir de jeunesse et de se conformer à l'ordre établi), j'avoue ne pas m'être vraiment retrouvé dans ce traitement troublant, cérébral et libre à de nombreuses interprétations (en lisant d'ailleurs un peu par ci par là concernant le film, j'ai pu me rendre compte que de nombreux éléments avaient pu m'échapper, ce qui est rarement bon signe lorsqu'il s'agit de comprendre une histoire).
Surtout, cela a beau être l'intérêt majeur de cette démarche, difficile de se sentir réellement concerné par un tel antihéros, qui, s'il incarne à la perfection cette période troublée qu'est le fascisme, ne procure que très peu d'émotion, pas plus d'ailleurs que son épouse, délibérément niaiseuse et naïve, et ce malgré le talent de Jean-Louis Trintignant et Stefania Sandrelli. Seule Dominique Sanda (dont je ne suis pourtant pas fou, habituellement) parvient à amener une réelle passion à travers ce qui est le personnage le plus attachant du film, quelques scènes parvenant même à être d'une beauté saisissante lorsqu'elle est présente, la composition musicale de Georges Delerue étant une fois encore un modèle. Le « pire », c'est que je ne peux même pas reprocher à Bertolucci ses parti pris, audacieux, intéressants, faisant de ce « Conformiste » une œuvre assez unique. Mais force est de constater qu'au-delà d'une esthétique somptueuse, sans détester le film (loin s'en faut), difficile de me reconnaître dans une démarche souvent difficile d'accès, et ce malgré plusieurs moments assez inoubliables. À voir quand même, ne serait-ce que pour se faire sa propre opinion.