" Je marche sur une terre qui perd la raison "
Une mère magnifique, une femme éblouissante, une actrice ratée. Un monde en passe de mourir, un cinéma tout autant, voilà le portrait que dresse l'excellente première partie du film de Folman. A elle seule, cette partie aurait valu un beau 10/10. Tout y est, la beauté du regard décalé d'Aaron, qui décide de voir et d'entendre ce qu'il veut, le désespoir de Robin Wright, les cris sanglants de l'agent, tantôt destructeur, tantôt amoureux. L'actrice qu'est Robin Wright disparaît alors peu à peu... Puis, dans quelques effluves de parfum, 20 ans après avoir été scannée, reproduite un peu partout, Robin se retrouve à un "Congrès futuriste" (où elle est l'invité d'honneur en pleine multiplication), en pleine animation. Une animation un peu folle, assez bien amenée, dans la voiture mais qui redonne à voir une Robin Wright encore comme actrice que personne ne reconnait.
Ce qui est fort ici, c'est qu'Ari Folman nous emmène dans le vrai/le faux, les rêves à répétition. Et surtout, il exploite merveilleusement bien la force du cinéma, à savoir, la dilatation du temps, cette ballade constante entre toutes les forces d’inconscients.
Après, il y a une petite morale qui s’invite, et on perd un peu le fil du discours sur l'actrice qui vieilli, sur la vie d'une femme entre erreur et amour maternelle pour se lancer dans une reconstruction du monde, où il faut partir à la quête de la technologie, ou aller contre elle pour chercher à tout prix l'essence de la vie. Mais ça se tient assez bien finalement, on est souvent fasciné par ce que parvient à faire Folman avec l'animation et surtout avec son scénario, souvent électrisant.
Bien qu'un peu long, le film joue parfaitement avec tout ce qui fait le cinéma et l'acteur également: peur, fantasmes, désirs, illusions, rêves... Tout cela au milieu d'un seul désir: réunir par un simple cerf-volant, une mère et son fils... Et revivre, à jamais, partout et nulle part. Finalement, c'est un cri d'amour au cinéma, aux actrices également. Et ce que cela dit du monde est assez époustouflant. Du rêve au cauchemar, rien n'est jamais bien loin.
Robin Wright y est magnifique, pleine d'auto-dérision, bien que parfois le film soit un peu plombé par des discours sur la "vérité" et les choix qui nous lassent un peu. Cela reste un très beau film, nécessairement original et complet parce que sincère et puissant.