The Shape of Night représente l’entrée en prostitution d’une jeune femme sous la forme d’une emprise masculine où les intérêts sentimentaux, financiers et symboliques se confondent : les deux hommes qui constituent l’entourage direct de Yoshie s’emparent tantôt de son corps – c’est le cas de son amant et proxénète Eiji – tantôt de son esprit – ici Hiroshi – par des considérations morales sur la vie ainsi menée, rendant notre héroïne tout à la fois responsable de sa chute et incapable de se débrouiller par elle-même. Cette omniprésence du masculin, associée à une toxine rendant malade Yoshie, est concurrencée par une solidarité féminine qui advient en cachette, hors des regards, soumise à la violence extérieure ; en cela, le dernier segment du long métrage offre des éléments de réflexion puissante où s’articulent propos théoriques et composition esthétique. Avant la clausule s’exécute une catabase tragique assez redondante, desservie par une photographie certes inspirée mais chichiteuse et plaquée sur un récit qui peine sinon à la faire naître. Reste un regard précieux porté sur les conditions de vie et de travail des prostituées au Japon qui enrichit un corpus déjà fourni – on pense, entre autres, à La Rue de la Honte (1956) de Kenji Mizoguchi.