Souvent oublié des exégètes du cinéma des années 70, notamment en raison de ses problèmes d’exploitation, Le Convoi de la Peur est pourtant l’une des œuvres majeures du Nouvel Hollywood et du cinéma tout court. Prenant comme point de départ le roman de Georges Arnaud, que H.G. Clouzot (l’un de ses cinéastes préférés) avait déjà transposé à l’écran, Friedkin offre une réactualisation de cette histoire de transport de nitroglycérine en la basant au sein d’un contexte géopolitique troublé, entre dictature militaire, autorités corrompues et compagnies pétrolières véreuses. Il est amusant de noter que par ailleurs, le patron de la Paramount, qui coproduit le film, faisait alors fortune avec ses forages pétroliers, ceci expliquant sans doute une partie des difficultés rencontrées par Friedkin avec ce film.

Le film s’ouvre sur le portrait de quatre personnages différents aux quatre coins du monde. Friedkin ne s’attarde pas sur les détails et ne livre que les quelques éléments qui permettent de comprendre pourquoi ces hommes ont du s’exiler au fin fond de l’Amérique du Sud. Tout juste s’attarde-t-il plus longuement sur l’Américain et le Français, ce qui fera que ces personnages seront ceux auxquels ont s’identifiera peut-être le plus. Pour autant, ces personnages ne sont pas des tendres, et une certaine ambigüité dans leur relation de se mettre en place. Dans un convoi aussi risqué, il faut se remettre en parti à l’autre, lui faire confiance pour avancer, mais pourtant, aucun n’est dupe et sait parfaitement que tous souhaitent la mort des trois autres pour empocher le maximum d’argent.

Ce qui marque dans la mise en scène de Friedkin, c’est le côté presque documentaire que le film possède par moment (renforcé ici par le format 1,33), on a l’impression que cela a eue lieu pour de vrai. A ce titre, la séquence où les cadavres sont ramenés au village est d’une saisissante réalité. Le film est réellement suffocant, l’atmosphère poisseuse et l’ambiance presque de fin du monde qui s’abat sur ce village pluriculturel permet presque de faire ressentir ce que les personnages supportent. A cela s’ajoute une dimension a la lisière du fantastique, à l’image de ces camions dont la carrosserie n’est pas sans rappeler ce mystérieux totem sculpté dans la roche, ou cette rencontre presque mystique avec un autochtone sur le chemin. Ce à quoi il faut naturellement ajouter la musique synthétique de Tangerine Dream.

Le film semble par ailleurs monté en puissance tout le long, toute les épreuves que nos personnages doivent traverser semblent de plus en plus insurmontables, ce qui sera l’occasion pour le cinéaste de livrer certaines des scènes les plus mémorables que l’on ai vu comme la fameuse scène du pont ou une des dernières, où le personnages de Roy Scheider est à la limite de la folie dans une séquence qui n’est pas sans rappeler le 2001 de Kubrick.

L’interprétation, internationale, est parfaite, et je pense que Roy Scheider est finalement un meilleur choix que McQueen. Scheider possède plus l’aura d’un homme « normal », et le film devient ainsi beaucoup plus prenant qu’il l’aurait été avec une star de la trempe de McQueen. A ses côtés, le toujours excellent Bruno Cremer impose toute sa classe naturelle pour camper un personnage sans doute le plus sympathique de tous. Rabal et Amidou sont tout aussi bon, mais un peu plus en retrait. Et c’est toujours amusant de voir des frenchies comme Jean-Luc Bideau ou Jacques François dans un film de Friedkin.

Sorcerer, chef d’œuvre ? Sans aucun doute.
ValM
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le 18 sept. 2014

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ValM

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