Un film sombre sur la déroute d’une existence. Celle d’Aldo, le bel Italien que la nature a bien servi mais qui cherche sa voie. Sa rupture avec Irma est dévastatrice. Elle était à la fois sa reine et son ancrage. Il est fait cocu du village et la fuite devient la seule avenue envisageable pour panser ses plaies. Au gré de son errance à travers des paysages qui reflètent la grisaille de son âme, il croise des femmes toutes aussi meurtries par les flèches de Cupidon. Chacune contribue, bien malgré elles, à nourrir sa détresse : Elvia, son ancienne amie de cœur, chez qui il a la lâcheté de retourner huit ans après l’avoir quittée pour Irma, Virginia, la pompiste en mal d’amour qui le pousse à abandonner sa fille de 7 ans et Andreina, la prostituée qui lui fait réaliser qu’il a atteint les bas-fond. Sa fuite le ramène finalement à la maison avec le faux espoir que le temps aura réparé les choses. Il réalise plutôt que la terre à continuer de tourner sans lui en apercevant Irma avec un nouveau-né. C’est le coup de grâce et la seule manière de retrouver sa dulcinée sera de se jeter mortellement à ses pieds du haut d’une tour. Le film devient un long traveling sur des êtres esseulés, écorchés par l’amour, maintenus en vie par le quotidien. Les comédiens appelés à les incarner sont tous au diapason, en vérité et en nuances. Le cri est le coup d’envoi d’une filmographie majeure, celle de Michelangelo Antonioni dont les œuvres prennent souvent les allures d’un long fleuve au courant trouble et profond. Un cinéma intelligent qui s’adresse au cœur et à l’âme.