Le Cri de la hyène par pierrick_D_

Dans une Chine où la guerre des clans fait rage,la team des démons Ciel et Terre,des affreux patentés,entreprend de massacrer ses rivaux des 8 Trigrammes.Les derniers survivants,deux frères et leurs fils respectifs,s'enfuient et se cachent pour échapper à la traque de leurs ennemis.Vingt ans plus tard ils sont devenus vieux et leurs fils sont devenus des jeunes hommes,mais voilà que les démons retrouvent leur trace.Ca va saigner!En ce temps-là Jackie Chan était la nouvelle star des films de kung-fu de Hong-Kong,ce qu'on appelait par chez nous les films de karaté."La hyène intrépide" ayant rencontré le succès en 79,cette suite est survenue quatre ans plus tard.Chan Chuen,un acteur devenu réalisateur,est derrière la caméra,et c'est produit par Lo Wei,celui qui avait lancé la carrière de Bruce Lee en réalisant "Big Boss" et "La fureur de vaincre"."Le cri de la hyène" présente les qualités et les défauts inhérents au genre.D'une part c'est bien foutu techniquement.De beaux décors,des costumes chamarrés,de la figuration en nombre dans de magnifiques paysages d'une Chine rurale à l'ancienne,contribuent à installer un visuel très plaisant,d'autant que la photo est superbe.En outre c'est bien filmé,notamment les combats qui constituent évidemment la base du film.Hélas il y a quelques problèmes majeurs.Les combats justement,qui bénéficient de chorégraphies extrêmement sophistiquées mais sont dépourvus de tout réalisme.On a plus l'impression d'assister à un spectacle de danse qu'à des bastons.Les coups ne sont visiblement pas portés,les mecs volent en l'air dès qu'ils sont frappés,tout est exagéré et factice,on dirait plus du hip-hop que du kung-fu.Il faut reconnaître que ça s'arrange vers la fin en forme d'hécatombe,avec des bagarres nettement plus sauvages et crédibles,à mesure que s'amoncellent les cadavres mêlant sans distinction gentils et méchants.Mais le plus gênant réside dans le scénario et le montage.C'est le festival de l'ellipse ici,et ça n'arrête jamais.Absolument toutes les scènes s'enchaînent de manière abrupte,ce qui a de quoi méduser le spectateur.Et ça commence dès le début,avec les deux gars et leurs gamins qui,pour échapper aux méchants,plongent dans une rivière.Les frères sont séparés,chacun gardant son môme,et celui qui arrive aux chutes d'eau disparait à la vue des poursuivants.Puis un plan d'ensemble,très joli d'ailleurs,nous le montre réfugié avec son gamin sur le côté de la cascade.Comment sont-ils parvenus là?Mystère et boules de gomme.Et clac,la scène suivante nous montre Jackie Chan en train de chasser et pêcher.Quoi,kescosékosékosa?En fait on finit par comprendre qu'on est 15 ou 20 ans plus tard et que Jackie est un des deux enfants,qui a bien grandi.Mais il faut procéder par déduction car rien n'est expliqué,jamais.Tout est du même tonneau,le montage ignore délibérément toute velléité de transition,et c'est pareil à chaque nouvelle séquence.Il faut donc toujours en début de scène un temps d'adaptation pour savoir où on est,avec qui et pourquoi.Par exemple on suit les exploits des deux fils lors d'une scène et le plan suivant enchaîne direct sur un autre personnage,ailleurs,qui se fait méchamment tabasser par les vilains.Et on déboule direct en pleine marave,le mec a déjà la gueule en sang.Non seulement on n'a pas le début du combat,mais on ne connait même pas les circonstances du contexte.Comment les salopards ont-ils trouvé leur victime?On n'en saura rien,on est là pour tracer.Les trous scénaristiques viennent épicer cette façon cavalière de conduire le récit,comme lors des retrouvailles des frangins.Après leur séparation lors de la scène d'ouverture,ils ne s'étaient plus revus et avaient fait leur vie chacun de leur côté en élevant seuls leurs fils.Pour quelle raison?On n'en saura toujours pas plus,pourtant ils vivaient en des lieux très proches l'un de l'autre.Toujours est-il qu'un des deux décide soudain de revoir le frérot,et paf ils se retrouvent dans la scène suivante,alors qu'ils étaient censés ignorer où était l'autre!Sans transition,on vous dit!Bien sûr tout ça baigne dans le fameux humour cantonais,d'une inimaginable lourdeur propre à réjouir un public d'enfants.Sinon les dialogues sont d'une stupidité et d'une grandiloquence stupéfiantes,et les acteurs surjouent à mort et sont des caricatures ambulantes.Jackie promène son air abruti,et il n'est pas le seul,les méchants nous régalent de leur continuel rire sardonique,les vieux sont des sages mais savent se battre,les mendiants sont mal loqués mais loyaux en amitié,le restaurateur est d'une cupidité sans borne,la grande foire folklorique bat son plein.Surnagent cependant quelques trouvailles,comme l'ingéniosité du cousin de Jackie,un fainéant qui a inventé tout un mécanisme pour vivre sans sortir de son lit,et la brutalité sauvage des combats finaux avec toutes ces morts et l'affrontement entre les deux cousins et les démons,lors duquel les inventions du paresseux auront leur utilité avec ces pièges mortels à la Rambo planqués un peu partout.Jackie et ses partenaires ne sont pas les rois de l'art dramatique mais leurs qualités physiques sont stupéfiantes.Ce sont des athlètes capables d'acrobaties invraisemblables qui ont de quoi impressionner.Il est vrai que Chan a été formé à l'Opéra de Pékin.