Par coquetterie sans doute, j’ai longtemps pensé que les meilleurs films d'Hitchcock étaient ceux réalisés en Noir et Blanc. Par coquetterie, peut-être, mais surtout par conviction, car le noir et blanc permet une plus grande immersion dans les ambiances angoissantes créées par le réalisateur.
D'ailleurs Hitch choisira volontairement de tourner "Psychose" en 1960 dans ce format, afin d'accentuer les effets cités.
Pourtant, de la couleur, il a tout compris, tout maitrisé d'emblée. "Dial M for murder" est son troisième film en couleur et ce n'est pas simplement la sensation que l'on a coloré une pellicule à la main qui domine ici. Non le film est une explosion de couleurs dans les premières minutes. Le rouge sublime du technicolor de la robe de l'incandescente Grace Kelly, souligne la joie, le désir, mais également une certaine insouciante.
Ainsi vêtue, la belle se permet de parader avec son amant devant son époux qui pense t-elle ne se doute de rien. Au fil du film, les couleurs vont s'atténuer jusqu'à devenir ternes lorsque la tragédie prendra toute sa mesure.
Evidemment, "Le crime était presque parfait" n'est pas uniquement un jeu de couleurs, c'est également et avant tout un huis-clos parfaitement maîtrisé, qui immerge doucement mais irrémédiablement le spectateur dans une atmosphère devenue de plus en plus oppressante. Les scènes virtuoses sont comme à l'habitude chez Hitch phénoménales , la scène du meurtre ou plus encore, la scène fantasmagorique du procès impressionnent.
A chaque instant le réalisateur crée une interaction avec le spectateur, connivence d'abord, puisque nous savons tout alors que les personnages dénouent les fils du mystère, ou bien manipulation qui nous pousse à souhaiter que le meurtre soit commis et reste impunis, puis que le coupable soit démasqué.
"Le crime était presque parfait" est au final un magnifique jeu de dupes.