Tellement de choses avec tellement peu.
Hitchcock place le spectateur dans une situation inconfortable. Toujours. C'est son grand truc. Le coup de la bombe sous la table : le spectateur sait qu'une bombe a été posée sous la table, aucun des protagonistes ne le sait et on ne sait jamais quand, comment ou si ça va péter. Donc c'est près de deux heures d'angoisse.
Hitchcock aime bien déstructurer. Il présente quelque chose de parfait, une femme, un couple, un plan, un cambriolage, n'importe quoi. Mais c'est parfait, lisse et généralement sans faille. Sauf que soudainement, tout part en vrille. Pour donner naissance à une toute autre situation, un moment inattendu, complexe qui amène vers un retournement totalement impromptu.
Ce "Dial M for murder" est bien entendu dans cette optique. Grace Kelly est tour à tour radieuse et lumineuse puis dévastée et au bout du rouleau, le mari erre entre les situations, les plans et les explications et enfin l'appartement est le symbole même de ce scénario changeant. On passe d'un lieu parfaitement lisse à un environnement hostile, hasardeux, mal ordonné témoin de la déstructuration du destin des personnages. Quasiment tout se déroule dans un seul lieu, pourtant on a l'impression d'être perdu dans un tourbillon chaotique.
Une œuvre magistrale et extrêmement maîtrisée, un exemple du cinéma au service d'une bonne histoire. Une mise en scène exceptionnelle en tout point.
Hitchcock s'apprécie de plus en plus avec le temps.