Film de commande soviétique, « Le Cuirassé Potemkine » est réalisé par le talentueux Eisenstein. L’œuvre est considérée comme le plus grand film de propagande de tous les temps, son discours est anti-tsarisme et communiste, et malgré la genèse et les raisons de cette production, rien ne l’empêchera de traverser les époques et de devenir une référence dans le monde des cinéphiles.
L’histoire raconte la mutinerie du cuirassé Potemkine pendant la révolution russe, du point de vue des mutins, ainsi que les conséquences de cette rébellion sur le peuple d’Odessa. Si dans le propos, la réalité historique est respectée, ce n’est pas le cas dans certaines séquences. Ainsi, la scène culte du landau dans l’escalier (le massacre du peuple d’Odessa) est parfaitement fictive, mais permet d’illustrer les véritables violences impériales sur le peuple (qui elles, ont bien eu lieu).
Il est clair que le réalisateur démontre un talent particulier pour la narration et le rythme. Le montage permet une intensité de suspens incroyable. Le nombre des figurants est spectaculaire. Les trucages sont réussis. Bien sûr, la scène emblématique du landau est la pièce maitresse de l’œuvre, de par son ingéniosité, son audace, sa violence, et surtout son innovation. En effet, la longue séquence utilise un travelling d’exception. Si ce n’est pas la première fois que le cinéma utilise cette technique, on ne l'avait jamais aussi bien réussi. Le résultat mérite d’être vu. La scène du massacre des civils de l’escalier est un passage remarquable techniquement, la violence est exacerbée, les visages des victimes déformés par l’exagération, chaque mouvement parait contrôlé au millimètre prêt, tout respire l’horreur de l’instant, c’est du grand art. La musique est aussi un aspect très réussi de cette production, elle sublime l’image.
Malheureusement, le film ne se résume pas à quelques scènes, et nous aurons aussi droit à de longues séquences mollassonnes, utiles à la compréhension de l’histoire, mais souvent ennuyeuses. La séquence finale, par exemple, est aussi importante et cruciale que décevante est frustrante.
Je ne pourrais pas dire que j’ai adoré ce film, même si je lui reconnais de grandes qualités. Je crois qu'il me manquait l'émotion. Le film en est affreusement dépourvue. D’une certaine manière, je n’ai pas été diverti, je dirais plutôt que j’ai observé cela comme un outil d’information, de compréhension, exactement comme quand notre prof d’histoire-géo nous projetait un film en cours. J’ai préféré ces aspects techniques à son sujet. L’idée qu’il soit un outil de propagande ne m’a pas vraiment embêté, mais je crains qu’un film de commande ne puisse que freiner la créativité et l’intention d’un réalisateur. Une chose est sûre, « Le Cuirassé Potemkine » mérite d’être cité parmi les chefs-d’œuvre du cinéma, ne serait-ce que pour ses aspects novateurs, le fait qu’il ait par exemple une vision nouvelle de la façon de faire un film.