Chronique d'un régicide annoncé.

Intéressant ou curieux? entendait on dans le film "tirez sur le pianiste" de François Truffaut. Depuis, je me pose souvent cette question à propos des films que je découvre. Et pour "le déluge", je réponds "intéressant et curieux" sans hésiter. Intéressant et curieux tout d'abord par le sujet car la fin du règne de Louis XVI n'a jamais été traité directement au cinéma (à ma connaissance).

On se retrouve ici dans la prison du temple où la famille royale fut incarcérée en 1792 et l'on suit leur lente descente aux enfers alors qu'ils sont privés de tous leurs privilèges, enfermés et coupés de leur ancien monde. Nous sommes donc à leurs côtés et nous découvrons un peu de leur intimité à travers leurs derniers jeux, leurs derniers repas ou leurs dernières conversations. Guillaume Canet en Louis XVI est très juste dans son ton et dans ses hésitations, il incarne à merveille cet homme qui a toujours été décrit comme peu sur de lui mais plein de bonhommie, timide et pas réellement fait pour la fonction. Mélanie Laurent est également à la hauteur en Marie Antoinette et l'on sent à chaque instant en elle, sur son visage, une colère froide et profonde qu'elle tente de contenir comme elle le peut. Intéressant et curieux aussi par ce rythme lent (sans être ennuyeux) et cette musique étrange qui installe une ambiance crépusculaire accompagnant parfaitement la chute libre au ralenti et la déchéance infligée à la famille royale captive. Un des moments savoureux du film est la rencontre entre Louis XVI et son futur bourreau, Charles Henri Sanson (l'homme aux 3000 tètes tranchées interprété ici par Jérome Pouly, sociétaire de la Comédie Française). Une discussion s'en suit au cours de laquelle Louis veut tout savoir du déroulement de sa future exécution et ceci comme s'il se renseignait sur le déroulé d'une cérémonie protocolaire plus traditionnelle.

Au chapitre "épisodes peu glorieux à l'international de l'histoire de France" Stanley Kubrick s'attaquait en 1957 à une des pages sombres de la grande guerre et nous livrait "les sentiers de la gloire". Aujourd'hui, au même chapitre, l'italien Gianluca Jodice nous livre un film éclairant sur une page tout aussi sombre, le régicide de Louis XVI. Il le fait de belle manière et c'est déjà beaucoup.