Certains films, en dépit de tout jugement critique bon ou mauvais, marquent les consciences par la grâce et le charisme de leur jeune interprète. On se souvient, entre autre, de Denis Lavant dans « Boy meets girl », de Gérald Thomassin dans « Le petit criminel » de Gaspard Ulliel dans « Les égarés », ou encore de Kolia Litscher dans « Charly ». Par la présence irradiante de Romain Paul « Le dernier coup de marteau », (dont c’est le premier film) est de ceux-là.
Il incarne Victor, jeune adolescent qui se retrouve au moment synchronique de sa vie. Entre précarité (sa mère, gravement souffrante l’élève seule), un père idéalisé (grand chef d’orchestre, qui ne l’a jamais reconnu) dont il voudrait profiter et une promesse de carrière dans le foot, sa vie est bousculée et son avenir dangereusement instable ne repose plus qu’entre ses seules mains.
Alix Delaporte compose ici une belle partition, toute en sobriété et technicité. En s’attachant à l’évolution de Victor, elle n’a de cesse de vouloir nous confier sensations et sentiments de son jeune héros, et choisit pour ce faire une syntaxe cinématographique aussi épurée qu’efficace. « Le dernier coup de marteau » est un drame qui se joue sous nos yeux, il ne tient pourtant pas du mélo. Le récit d’un pragmatisme implacable est gorgé d’un espoir salvateur. On sent, quoiqu’il advienne, que Victor s’en sortira, déterminé et combattant, il se trouve être plus mature que les adultes qui l’entourent, que ce soit la mère, véritable souffrance incarnée (formidable Clothilde Hesme) ou ce père égocentrique (trop rare et excellent Grégory Gadebois).
Et si le titre fait référence à la neurasthénique 6ème symphonie de Mahler, Victor pourrait faire sienne les paroles du maître « Si ma vie ressemblait au courant tranquille d’un ruisseau dans une prairie, j’aurai l’impression que je ne pourrais rien faire de bien »