Un relent d'égout fait surface. Truffaut anciennement critique de la "qualité française", avec très peu de remords, nous a fait un film de papa. Lui, autrefois très acerbe sur les films de Claude Autant-Lara, se la raconte moins. Sa place étant bien réservée dans le monde du cinéma, il est tout à fait commode à nous envahir d'images qu'il vomissait. L'ancien résistant de la vitalité cinématographique française a reçu les galons et il n'hésite guère à copier l'ancienne garde qu'il haïssait. La liberté des personnages n'existe plus, ils sont destinés à rester enfermés dans leur cave, dans leur hôtel, et pire encore dans leur rôle. Je comprends maintenant la rancœur de Godard, son acolyte révolutionnaire, qui sûrement rouge de colère a vu ce tournant artistique comme une trahison. Mais la proposition financière était bien trop avantageuse, et au diable le progressisme quand il fait moins d'entrées que l'académisme. La dispute sous la pluie entre Depardieu le romantique et Deneuve la tenancière est une jolie transcription de l'animosité entre les deux loustics. Godard et son art politique face à Truffaut et son marché à faire tourner. Malheureusement, le public donnera raison au commerçant, Le Dernier Métro est son deuxième plus grand succès après l'inoxydable Les 400 Coups. Que le chemin est grand entre ces deux films.
Le Dernier Métro est un bon moyen pour se détendre, le rythme est parfait, et la politique est affaire de décors ou de marivaudage. On ne s'ennuie jamais grâce aux talentueux acteurs qui sont magnifiquement costumés et coiffés (vraiment les coiffures de Deneuve sont très belles). Mais derrière tous ces apparats, que reste-t-il du monde et de l'art ? Que tente-t-il de nous faire ressentir du particulier dans ces dialogues engoncés et que comprend-on de l'universel dans cette mise en scène obsolète ?