Peine incompressible
Faut-il être à tout prix indulgent pour l’œuvre d'un cinéaste harcelé par les autorités de son pays, emprisonné à l'occasion et interdit de sortie de son territoire, entre autres brimades ? La...
le 1 déc. 2020
35 j'aime
2
Faut-il être à tout prix indulgent pour l’œuvre d'un cinéaste harcelé par les autorités de son pays, emprisonné à l'occasion et interdit de sortie de son territoire, entre autres brimades ? La réponse est évidemment négative mais ne se pose pas dans le cas de Le diable n'existe pas de Mohammad Radoulof, Ours d'Or à Berlin. Néanmoins, il n'est pas inutile de préciser que la qualité du film, y compris sur le plan plastique, ferait presque douter qu'il a été tourné de façon clandestine, au nez et à la barbe de la censure, à laquelle Rasoulof a fait croire qu'il réalisait 4 courts-métrages. Ce n'est pas entièrement faux, d'ailleurs, puisque son film est construit autour de 4 histoires distinctes, sketches dirait-on en d'autres circonstances, mais reliées par un sujet commun : la peine de mort. Les récits se répondent, peu ou prou, le deuxième et le quatrième, notamment, et posent la question de l'engagement et du courage dans une société coercitive avec la quasi impossibilité de dire non et de se rebeller, ou alors à ses risques et périls. Certains trouveront sans doute le film trop programmatique, directif et peu subtil mais c'est faire peu de cas de l'efficacité intrinsèque de chaque segment, de la variété de traitement (chronique, thriller, mélodrame ...) pour parvenir à un ensemble d'une cohérence absolue et passionnant de bout en bout, par les nuances apportées dans des narrations toujours claires et brillantes, faisant la plus large place à l'humanité de chacun de ses personnages dans un pays qui n'a d'autre but que d'étouffer les libertés individuelles et de réduire les oppositions à néant. Le diable n'existe pas est bien davantage qu'un film-dossier, disons à la Cayatte, c'est du très grand cinéma, un chef d’œuvre, n'ayons pas peur des mots, qui ne va pas arranger le cas de Mohammad Rasoulof mais dont le retentissement, on l'espère, lui permettra de continuer à faire son travail, sans avoir peur de payer sa liberté de penser et de s'exprimer contre toutes les forces obscurantistes. Ce qui serait une manière de démontrer que le diable, s'il existe, peut aussi être combattu avec les armes du talent et de la bravoure.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Top 10 Films, 2021 : quelle belle année en salles (ou pas), Au fil(m) de 2021 et Les meilleurs films de 2021
Créée
le 1 déc. 2020
Critique lue 5K fois
35 j'aime
2 commentaires
D'autres avis sur Le Diable n'existe pas
Faut-il être à tout prix indulgent pour l’œuvre d'un cinéaste harcelé par les autorités de son pays, emprisonné à l'occasion et interdit de sortie de son territoire, entre autres brimades ? La...
le 1 déc. 2020
35 j'aime
2
Quitter le travail, circuler dans des rues embouteillées, récupérer femme et enfant, aller à la banque, rendre visite à sa mère malade, surveiller les devoirs scolaires, dîner dans une chaîne de...
le 27 avr. 2022
12 j'aime
Quoiqu'on en dise, quoiqu'on en pense, Le Diable n'existe pas, ou Il n'y a pas de Diable si l'on traduit le titre original Persan, est un film important. Et son réalisateur est bien courageux. Car...
Par
le 12 déc. 2021
10 j'aime
2
Du même critique
Et sinon, il en pense quoi, l'office de tourisme galicien de As Bestas, dont l'action se déroule dans un petit village dépeuplé où ont choisi de s'installer un couple de Français qui se sont...
le 28 mai 2022
79 j'aime
4
Il est quand même drôle qu'un grand nombre des spectateurs de France ne retient du film que sa satire au vitriol (hum) des journalistes télé élevés au rang de stars et des errements des chaînes...
le 25 août 2021
79 j'aime
5
Enfin un nouveau film de Jane Campion, 12 ans après Bright Star ! La puissance et la subtilité de la réalisatrice néo-zélandaise ne se sont manifestement pas affadies avec Le pouvoir du chien, un...
le 25 sept. 2021
72 j'aime
13