Le roi est nu, vive le roi !
Le discours d'un roi est un film de facture classique et académique, complètement linéaire, qui va du discours raté du stade de Wembley lorsque le futur George VI n'est alors que Albert Duc d'York à son premier discours royal radiodiffusé qui annonce l'entrée en guerre de l'empire britannique face à l'Allemagne.
Cependant, c'est dans les vieilles marmites qu'on fait les meilleurs Irish stews et cette histoire sans surprise permet de donner à tous les acteurs toute la place pour laisser libre cours à leur talent. Colin Firth en tête, qui excelle en prince frustré par son bégaiement incontrôlable avec cet air de chien battu qu'on aime tant.Il peut enfin briller dans un rôle taillé pour lui où il montre sa vulnérabilité sous le masque de l'aristocrate guindé et coincé par le protocole. A ses côtés, sa femme jouée par Helena Bonham Carter qui pour une fois ne joue pas une folle macrocéphale et/ou à rayure pour son mari Burton rappelle qu'elle sait aussi jouer et qu'elle peut être drôle et émouvante.
Geoffrey Rush, en gourou du langage et acteur raté insuffle un côté burlesque bienvenu dans le film.
La force du film réside dans sa capacité à transmettre le sentiment de frustration et de honte que provoque le bégaiement. Il fait remonter les angoisses que tout le monde a déjà eu lors d'une récitation de poésie annonée devant une classe hilare, de la peur de faire une erreur dans un discours important devant un public attentif à la moindre erreur, en alternant les plans de foules muettes qui attendent chaque mot toujours plus difficile à prononcer et des très gros plans de George VI en lutte perpétuelle avec lui-même.
Seul bémol que j'apporterais à ce film : la musique de Desplat (comme depuis quelques films déjà) est poussive et ne fait que de l'illustration sonore sans grand intérêt qui casse un peu le rythme et donne un petit côté téléfilm "de prestige". .
Même si Georges VI n'a eu qu'un rôle somme toute accessoire et de représentation dans la seconde Guerre Mondiale comparée à la figure de Churchill, le film pose intelligemment la question des répercussions d'une histoire personnelle sur la Grande Histoire.
Napoléon 1er était paraît-il aussi bègue. Ainsi que Bayrou.
J'espère juste que ce film ne va pas lancer une mode de biopics sur les troubles du langage. Un bègue oui, trois bonjour les dégâts.