Pour sa première réalisation, PIerre Richard a fait un film qui ressemble au personnage qu'il incarne.
Le Distrait est une comédie, et Pierre Richard essaie de combiner les différentes formes de comiques. Un comique visuel bien sûr, mais qui n'est pas le plus convaincant chez lui. Les gags sont bien orchestrés mais sonnent faux, ils sont prévisibles et laissent trop facilement entrevoir les nombreuses répétitions et les gestes millimétrés. ça manque de vie et de folie.
Par contre, les dialogues sont excellents. Jeux de mots, répliques absurdes, les paroles sont d'une grande qualité. A voir, par exemple, un improbable discours de Pierre Malaquet (le personnage incarné par Pierre Richard) qui tente d'expliquer sa conception de la publicité. A savourer également les deux scènes où Pierre Richard rencontre Paul Préboist (qui incarne un autre distrait maladif) : de grands moments hilarants.
Mais c'est ailleurs qu'il faut chercher la grande réussite du film. A côté de son humour, Pierre Richard parvient à se façonner un personnage magnifique, une sorte de Pierrot lunaire, toujours à côté de la plaque mais jamais ridicule. Un personnage attendrissant et irrésistible, qui se révèle surtout dans les scènes romantiques qu'il partage avec Lisa (Marie-Christine Barrault). Il développe un style très particulier, un humour tendre, jamais méchant. On y sent les influences des grands maîtres du muet, Chaplin et Keaton en tête. La scène où il se promène en pleine nature, tenant la main de Lisa et avec une roue sous le bras, montre bien ce côté gentiment décalé, assez proche du non-sense britannique.
Là aussi, les dialogues font beaucoup pour cette poésie absurde :
"Vous me raccompagnez ?
_ Je veux bien, mais nulle part."
Et le bougre ne s'arrête pas là. A travers l'histoire d'un maladroit qui détruit complètement une grande entreprise de publicité, Pierre Richard s'attaque à la manipulation publicitaire. Des pubs qui font de plus en plus appel aux pires sentiments et jouent sur les peurs ou les désirs inavoués.
Et tout ça sous l'aspect d'une agréable petite comédie. La réalisation est hélas assez terne, mais le casting est excellent. Aux côtés de l'immense Robert Dalban, on retrouve Yves Robert et un improbable et délirant couple Bernard Blier/Maria Pacôme, qui s'ébat en pleine nature en faisant "gazou gazou".