Cinéaste de l’intime, Philippe Lioret est un remarquable directeur d’acteurs qui sait qu’un regard en dit souvent bien plus long que les mots. Ici, le réalisateur français peut à nouveau compter sur d’excellents interprètes pour figurer des personnages tout en nuances dont on perce peu à peu les secrets et les douleurs rentrées. Pierre Deladonchamps rend à merveille le caractère ambivalent de son personnage, à la fois tranquille et inquiet. Quant à Pierre, sexagénaire qui cache un cœur d’or derrière ses manières d’ours, il est incarné avec beaucoup de justesse par le formidable Gabriel Arcand, véritable monstre sacré du cinéma et du théâtre québécois.
La vie de Mathieu, 33 ans, est bouleversée lorsqu’il reçoit un appel du Canada qui lui apprend que son père, qu’il n’a jamais connu, vient de mourir. Découvrant qu’il a deux frères ignorés dans la Belle Province, il saute dans un avion et débarque à Montréal pour assister à l’enterrement. Précipité dans un environnement dont il ignorait tout jusque-là, Mathieu se découvre une nouvelle famille dans laquelle il va jouer un rôle bien plus important qu’il ne l’imaginait… Difficile d’en dire plus sur les relations entre le jeune Français et ses hôtes canadiens puisque le film comporte une révélation finale qui oblige le spectateur à reconsidérer d’un œil neuf tout le déroulement de l’intrigue. Déjà utilisée dans Je vais bien, ne t’en fais pas, cette astuce scénaristique empruntée au polar peut paraître trop volontariste, brisant sans prévenir la part d’incertitudes et de non-dits savamment entretenue pendant plus d’une heure. Du coup le film perd en mystère ce qu’il gagne en émotion et la quête initiatique se transforme en mélodrame familial un peu trop convenu.
(critique écrite à la sortie du film)