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Le Gang des Antillais est un thriller dramatique inspiré de faits réels signé Jean-Claude Barny. Le réalisateur revient sur l'affaire du Bumidom dans les années 70' et les débordements extrêmes que cette politique migratoire a engendré. On y suit donc un groupe d'antillais, évoluant au sein d'un organisme plus grand, un gang, et dont le but est de faire tomber l'oppression qu'ils subissent et l'injustice de leur situation. C'est donc un contexte historique bien particulier qui est dépeint ici et nous suivons plus particulièrement un jeune homme en quête de réponse, en proie au doute, en plein apprentissage et découverte de la vie et de sa position face à celle-ci. Il devra faire des choix, répondre de ses actes, il prend peu à peu connaissance de ce que signifie être responsable, que ce soit pour lui-même comme pour son entourage ou les organisations qu'il combat.
On retrouve dans ce film Mathieu Kassovitz et Lucien Jean-Baptiste pour des seconds rôles très brefs et leurs présences ne surprend pas. Pour le réalisateur de La Haine, très porté sur les thriller sociaux, un tel sujet est passionnant. Quand à Lucien Jean-Baptiste, c'est un acteur qui se développe en ce moment et qui choisit ses rôles avec de plus en plus d'attention, et ce film en est une preuve. Dans le même style on pourrait penser aux films La Haine et Les Lyonnais, dont Le Gang des Antillais frôle la qualité. Les thèmes abordés sont totalement différents mais la manière de traiter le sujet et de créer l'ambiance autour est sensiblement la même. Assez sombre, mêlé à un peu de légèreté mais suffisamment dur pour atteindre la sensibilité du spectateur, permettant de rendre cette histoire passionnante à suivre.
Il survient cependant différents problèmes. Le fait est que l'histoire se déroule à une période relativement méconnue des générations actuelles. Il n'est donc pas illogique de se retrouver face à l'inconnu lorsque le film parle de Bumidom. C'est une histoire qui a entre 35 et 50 ans, ça semble court sur une échelle historique, et ça l'est puisque des gens ayant subis cette période sont encore là pour en parler, mais c'est assez vieux sur une échelle générationnelle. L'histoire est avant tout centrée sur le personnage de Jimmy, d'où le fait que le contexte historique n'est pas autant fouillé, et c'est peut-être un atout, cela évite sans doute de rendre le film trop lourd, trop larmoyant, trop éducatif. Le problème reste que lorsque le terme « BUMIDOM » apparaît, le spectateur est vite largué s'il ne sait pas de quoi il s'agit au préalable. Par ailleurs, le film est un peu trop auto-centré sur le parti des immigrés. C'est une des conséquences du manque d'explication quant à la situation politique et sociale de cette époque. On sent bien qu'il y a un souci, mais pour un jeune public pas forcément au courant de cette situation, les agissements du gang des antillais semblent extrêmes et manquent de légitimité alors que la volonté du réalisateur est totalement inverse.
Mais là encore c'est une manière de faire assez française. Le but premier est de raconter l'histoire de Jimmy et non du Bumidom. C'est précisément cet aspect qui fait la qualité du Gang des Antillais. C'est ce qui caractérise ce genre de drame. Le personnage est plus mis en avant, il est le centre de l'histoire contrairement à son contexte politique et social. Cela laisse beaucoup plus de place au jeu d'acteur. En l'occurrence Djedje Appali, Zita Hanrot ou Vincent Vermignon tirent leur épingle du jeu et offrent un jeu très convaincant, au même titre que les jeunes acteurs de La Haine, dont Vincent Cassel faisait partie. L'autre point qui a pu orienter ce choix esthétique de délaisser le contexte historique au profit des personnages peut s'avérer être un manque d'argent. Cela se voit par l'absence de la scène de braquage, rappelant dans une bien moindre mesure Reservoir Dogs. Il s'agit peut-être là encore d'un choix et non d'une contrainte, l'avenir nous dira s'il a payé.
Dans sa globalité Jean-Claude Barny offre une œuvre relativement standard. La construction générale de son long-métrage (les scènes, les péripéties, les réactions, trahisons, les entraides et entourloupes etc) sont assez classiques. Les dialogues sont simples mais efficaces pour la plupart, bien qu'en évitant les lourdeurs ils en deviennent presque instantanément subtils. Finalement c'est son caractère classique mais efficace qui fonctionne. Le réalisateur se base sur ce qui a déjà fonctionné par le passé sans malheureusement le renouveler mais en rappelant qu'on pourrait un peu plus souvent s'en inspirer. Enfin, on appréciera que Mathieu et Lucien ne soient pas présents uniquement pour leur notoriété, malgré la présence d'Eriq Ebouaney, laissant la possibilité aux autres acteurs de vivre plus longtemps à l'écran.