Incroyable film dans lequel Kurosawa ne cache pas comme à son habitude son cynisme et c'est par le biais une superbe mise en abyme que le spectateur, à travers le regard noir de Sanjuro, est attiré par le sang tel un charognard, vers ce village qui s'entredéchire dans un conflit apriori absurde. On sent une tension latente tout au long du film, sublimé à travers une mise en scène incroyable, notamment l'utilisation de cadres (portes, fenêtres, volets) permettant au spectateur de prendre de la distance avec les événements, de gros plans sur le visage du personnage principal, qui isole et donc isole également le spectateur dans son observation du conflit, mais dont la cupidité de Sanjuro va petit à petit laissé place à une conscience morale naissante. Kurosawa reprend d'ailleurs la figure romantique du ronin complétement esseulé, marginal dans un Japon moderne en pleine mutation sous l'ère Edo, figure devenu presque mythologique, à travers l'héritage du fameux récit de Musashi (La pierre et le sabre, la parfaite lumière) dont on sent l'influence chez Kurosawa.
D'ailleurs le film lui-même aura une réelle influence bien connue dans le cinéma des années 60 (Sergio Léone, Jean-Pierre Melville), mais également bien au-delà dans la musique notamment chez le groupe de rap français IAM ou encore dans le manga chez Takehiko Inoue, aka le plus grand mangaka, dans son oeuvre Vagabond (avec son utilisation d'ombres très marquées, une utilisation du vide etc.. qui renforcent la solitude du spectateur dans un monde désabusé et froid).
Bref un tel film, c'est ce qu'on appelle un classique!