Ça ferraille un max
Comment se fait-il que ce film brillamment réalisé, avec une mention spéciale à la photographie, et au sujet fort, librement inspiré du conte d'Oscar Wilde, émeuve si peu et indiffère autant ? Sans...
le 28 déc. 2013
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Ce film, qui m'a été conseillé par mon amie Cécile, m'a plu, par sa thématique sociale, héritée du cinéma social britannique, digne de Ken Loach ou de Stephen Frears.
Néanmoins, il n'est pas à la hauteur de ses maîtres, car j'ai trouvé son scénario un peu simple et prévisible, même si la photographie est superbe et l**'interprétation remarquable.**
On suit au fil de l'histoire l’itinéraire de deux gosses paumés, vivant dans un quartier pauvre d'une petite ville d'Angleterre et qui cumulent problèmes de famille, misère sociale, problèmes psychologiques et échec scolaire.
Animés de la louable intention d'aider leurs parents à payer les traites et éviter de se faire dépouiller de tous leurs meubles, les deux garçons vont se déscolariser et prendre un petit job : la récupération de ferraille.
En effet, les deux compères ne veulent plus perdre leur temps au collège, duquel le plus jeune des deux a été exclu, car il est très violent avec ses camarades et extrêmement provocateur avec les professeurs, les insultant à tout bout de champ.
On comprend vite que le jeune Arbor est atteint d'un syndrome qui le rend très nerveux et parfois violent. Il prend des médicaments pour lutter contre ses accès, mais ces derniers ne sont visiblement pas efficaces.
A mon avis, Arbor est atteint du fameux TDAH (Trouble de Déficit de l’Attention avec Hyperactivité), dont est affecté également le héros de "Mommy" de Xavier Dolan. une comparaison entre ces deux héros serait d'ailleurs intéressante (piste à explorer).
Seule la vie au grand air, en dehors du collège, avec son ami, Swifty, lui convient, avide qu'il est de liberté et d'indépendance.
Swifty, raillé par ses camarades qui lui reprochent de sentir mauvais, comme l'ensemble de sa famille, est bien content de fuir ce milieu et de suivre son ami qui prend régulièrement sa défense.
Ils vont être alors exploités par Kitten, un sale type, ferrailleur sans scrupules, qui se préoccupe peu de la provenance des matériaux tant qu'il perçoit des dividendes.
Ce "géant" est aussi propriétaire d'un cheval, qu'il utilise pour arrondir ses fins de mois, lui faisant faire des courses d’attelage.
Or, le plus grand des deux garçons, Swifty, est amoureux des chevaux et il est choqué quand il voit les adultes malmener le cheval de Kitten, pour qu'il aille plus vite lors des courses, ou lorsque son copain, Arbor, électrocute un poulain afin de tester l’électricité d'un pylône dont il veut dérober les fils pour se faire de l'argent.
C'est le règne de la débrouille pour ces deux enfants, qui cependant propulsés trop jeunes dans le monde du travail au noir et les trafics, vont bientôt s'attirer des ennuis, jusqu'au drame final que je me garderai bien de révéler afin de ne pas spoiler davantage.
La situation de ces gosses fait vraiment pitié car rien ne leur est épargné, pas même la manipulation des adultes qui les dominent et les exploitent.
J'ai trouvé le tableau un peu pathos, manquant légèrement de nuances. Ce thème, je pense, aurait sans doute été traité avec plus de subtilité par Ken Loach grâce à son génie.
En revanche, j'ai trouvé l'interprétation des deux jeunes acteurs formidable. Ce sont deux noms à retenir : Conner Chapman et Shaun Thomas, qui j'espère perceront au cinéma, tant ils ont du talent et de l'énergie, surtout le plus jeune. Ils interprètent avec beaucoup de justesse ces gosses débrouillards, un peu rudes mais très complices et sensibles. L'amour de Swifty pour les chevaux est l'illustration de sa sensibilité et cet amour, il le transmettra malgré lui, à Arbor, après sa disparition.
L'intérêt du film se trouve également dans sa photographie, notamment des paysages : le contraste entre le centre ville et les champs alentours où paissent les chevaux est saisissant.
Les petites maisons ouvrières de brique, en bande où habitent les gosses et leurs familles sont tout à fait typiques des quartiers populaires des villes du sud de l'Angleterre. Ces champs et la ville sont entourés de pylônes électriques omniprésents qui aboutissent aux fourneaux géants de la centrale nucléaire, ombre inquiétante qui plane au dessus de tout ça, comme sur l’avenir amputé des enfants.
Les ombres et les lumières, admirablement traités, selon les moments de la journée (aube, crépuscule, nuit) apportent une poésie supplémentaire, qui suggère encore davantage que seule la nature est apaisante.
Par contre, étant donné que j'ai vu que le film s'inspirait du conte d'Oscar Wilde du même nom, j'en ai lu le résumé sur Wikipédia et j'ai tenté d'en faire la comparaison. Celle-ci se révèle ardue, tant je ne vois pas trop ce qui les rapproche, hormis le fait que ces deux gosses amènent sans doute de la vie là où elle a disparu : dans le cœur de leurs mères, auprès des chevaux, dans cette campagne triste et désolée, dans ce monde de brutes que sont les ferrailleurs et les trafiquants de tout poils.
Qui est alors le géant égoïste ? La brute Kitten, la centrale électrique, la société qui maltraite ces enfants ? Je m'interroge. Vous pourriez peut-être me donner votre point de vue; on pourrait en débattre ....
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le 9 janv. 2016
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