Testament pour Ozu qui décèdera brutalement d'un cancer peu de temps après, Le Goût du Saké met en scène un père veuf qui songe à l'avenir de sa fille lorsqu'un de ses amis lui propose un gendre pour elle.


D'abord, je retrouve dans Le Goût de Saké tout ce que j'ai aimé dans ma courte expérience avec le cinéma d'Ozu, c'est-à-dire une façon unique de filmer la vie avec justesse, intelligence et sans excès, avec un art pour rendre les destins qu'il met en scène passionnant. Ici, c'est autour de la fin de l'éducation qu'il axe son film, il met en avant un père qui veut lancer sa fille dans la vie, la rendre autonome et indépendante de lui, ce qui passe, selon les traditions, par un mariage. Un des autres points du cinéma d'Ozu que j'aime beaucoup, c'est sa manière de capter l'époque qu'il filme en nous plongeant dans le contexte avec les coutumes qui vont avec, ce qu'il fait parfaitement bien ici.


La force d'Ozu avec Le Goût du Saké, c'est de faire ressortir toute l'émotion et la richesse des enjeux et personnages. Ces derniers sont assez vite rendu intéressants, il les capte dans de simples moments de vies tandis qu'il jongle toujours avec brio, et talent, entre plusieurs genres. Il sait se faire bouleversant sur la situation du père, qui voit la vie défiler, la vieillesse arriver et sa fille toujours seule mais alterne avec des moments plus légers, de vies à l'image de ceux, parfois drôles, où les amis sont assis autour d'une table pour boire du Saké et par moments tomber dans l'ivresse. Derrière ces personnages, il aborde aussi la solitude et l'angoisse que ça peut engendrer, les scènes avec l'ancien professeur et sa fille sont d'une rare justesse et puissance.


Derrière la caméra, il se montre à nouveau brillant, que ce soit sa façon de filmer les personnages ou de jouer avec les couleurs, toujours sans aucun excès et avec justesse (je me répète mais quel talent !). Il donne de la puissance à son récit, sans tomber dans le spectaculaire ou la dramatisation, et nous y immerge en plein cœur, aux côtés des personnages. Ces derniers sont tous très bien dirigés, se fondent dans leur rôle et font eux aussi ressortir la richesse et l'émotion de leur personnage, mention spéciale à Chishu Ryu.


C'est un testament d'une richesse, profondeur et justesse rare que propose Ozu qui, à travers les sept films que j'ai vus de lui, m'aura déjà très fortement marqué, notamment par sa façon de filmer la vie, ses émotions et dilemmes, et ce avec puissance, intelligence, dramaturgie et justesse.

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le 17 janv. 2017

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Docteur_Jivago

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