Dans la banlieue parisienne, quatre jeunes qui pensent plus à picoler et faire de la moto au lieu de travailler, se retrouvent au commerçant du coin. Qui va être menacé par la construction (dès le lendemain de son annonce !) d'un supermarché.
Au-dessus des Fous du stade et des Bidasses en folie, tous réalisés par Claude Zidi d'ailleurs, Le grand bazar est la réussite majeure des Charlots. Qui est un quintette, puis quatuor, majeur de la comédie française des années 1970. Je devrais parler d'ailleurs de burlesque, tant chaque scène tient du pur gag. A ce titre, le tout début, où chacun des garçons doit réveiller l'autre dans leurs appartements respectifs, est un modèle de construction et d'humour non-sensique auquel je suis très sensible. Tout certains moments absurdes, par exemple celui où la voiture avec deux policiers se détache en deux morceaux, parce que l'un a dit qu'il fallait se séparer pour chercher le motard en fuite !
Tout est comme ça dans ce film que je trouve non seulement très drôle, mais qui parle en filigrane de la France de Pompidou, celle du début des années 1970, où on pouvait trouver du travail très facilement, mais l'expansion économique se manifestait d'une part par la construction de cités dans les banlieues autour de Paris, mais aussi par l'arrivée massive des supermarchés. Certes, tout cela existait depuis le début des années 1960, mais il y a eu une accélération à cette époque, où on pourrait presque parler d'abondance. Voir l'arrivée de cet Euromarché (nom que j'ai connu à la fin des années 1980 et qui a totalement disparu aujourd'hui), la joie des ménagères (terme exprimé tel quel) devant les étalages remplis à ras bord... Du coup, l'épicier que joue Michel Galabru, situé de l'autre côté de la rue, apparait comme un vestige du passé, avec des plans qui font penser au Chat dans le sens où ce magasin reste envers et contre tout devant l'érection d'immeubles.
C'est sûr qu'il n'y a pas à chercher la moindre logique ni cohérence devant certains gags, comme la course aux cochons dans le supermarché ou les bodybuildeurs qui font office de caissiers pour séduire les clientes, mais tout cela respire une innocence, une naïveté, une joie de vivre que j'ai l'impression que le film parle aussi de son époque, les petits commerces qui se font bouffer par plus gros, la défense du local... autant de choses qui sont encore et toujours actuels.
Mais il ne faut pas nier le fait que Le grand bazar est non seulement une madeleine de Proust, mais aussi, à mes yeux, une comédie très drôle. Où le reste du casting est aussi à l'avenant, comme la présence de Roger Carel, Michel Serrault en directeur du supermarché, Jacques Seilier (le grand au crane rasé qu'on voit très souvent dans les films des Charlots), Coluche (dans la scène très drôle de la visite d'un appartement) et un tout petit rôle pour Dominique Lavanant (qui essaie de voir le souci qu'il y a dans son moteur, jusqu'à le faire sauter tellement elle appuie sur l'accélérateur).
Ce qui fait que le film sera un immense succès, et une belle réussite, du cinéma comme on ne pourrait plus en faire à mon sens.