Ce n'est pas le plus connu des films d'Alexandre Arcady. Pourtant, il y a des moments assez amusants dans le film et il y a une présence de l'Histoire sous-jacente qui est intéressante.
Pour ce dernier point, l'histoire se déroule principalement entre le moment du débarquement américain en Algérie en 1942 et leur départ pour le débarquement en Sicile en 1943 entrainant avec eux des appelés français et algériens.
Le film n'a certainement pas une ambition historique. Simplement il s'appuie sur ces évènements pour évoquer les relations américano-françaises ou les relations franco-algériennes pendant cette période et leurs dérives possibles liées au contexte politique et au marché noir.
C'est en creux que le film est intéressant. Par exemple, lorsque Arcady montre Michel Creton, la face noire des colons, en train de corriger un paysan sous l'oeil goguenard d'un officier américain. Ou encore que Arcady montre un algérien, ancien combattant et médecin, ayant acquis la nationalité française, pris par erreur dans une rafle pour une conscription "volontaire".
Quand on y prend garde, le film est émaillé d'allusions et de signes qui seront autant d'éléments et de racines d'un désir d'émancipation qui peu à peu se concrétisera. Et c'est tout à l'honneur d'Arcady.
Le film d'Arcady est bien réalisé et bien monté. Il me semble me souvenir avoir lu que le film a été tourné en Tunisie mais j'ai un petit doute. En tous cas, la photo est lumineuse et aide à porter l'impression d'insouciance qui baigne le film. On prend plaisir à suivre les aventures (assez jubilatoires) de marché noir et de trafics divers organisés de main de maître par quelques militaires américains qui ne perdent pas le nord.
Le casting est de bon niveau. Arcady a un art certain de choisir ses acteurs et d'en faire des archétypes (sans être pour autant caricaturaux).
Avec un Roger Hanin plus vrai que nature, tonitruant dans un rôle de bistrot qui, bien motivé par le trafiquant américain, s'en donne à cœur joie. On ne peut pas s'empêcher de ressentir une certaine sympathie pour ce personnage à la faconde ravageuse...
Avec un Philppe Noiret dans le rôle d'un gros propriétaire fermier et du maire de la petite bourgade, Tadjira ... Intéressant personnage dont la fine éducation de haut niveau a du mal à cacher son mépris envers la classe moyenne (les Roger Hanin and co avec leur souk) ou la population arabe.
Ensuite, on a droit à toute la population habituelle des films d'Arcady à commencer par Marthe Villalonga en éternelle mère juive (alors qu'elle n'est ni mère ni juive), Gérard Darmon, Jean Benguigui, Jean-Pierre Bacri, Lucien Layani qui passent leur temps à vociférer, s'engueuler, s'interpeler, youyouter, rigoler, boire, draguer, se lamenter, etc ...
Et puis il y a les extras : Patrick Bruel mutique mais sympa, la très très troublante Fiona Gelin qui affole les cœurs de tous ces machos sous le soleil méditerranéen, Richard Berry dans le rôle du fils de Roger Hanin, aviateur dans l'armée alliée, ...
Oui, c'est un film bien sympa qu'on peut regarder au premier degré et ne voir que la chronique sociale. Mais il est aussi très intéressant de décrypter les messages que nous susurre Arcady sur une certaine réalité et sur les prémisses de ce qui se passera une bonne quinzaine d'années plus tard.