Sergio Corbucci est un gros tourneur sans génie, un peu comme un Hathaway ou un Christian-Jaque, mais sans la rigueur technique du premier ni le charme suranné du second. Quand il a un Totò confirmé et une honnête comédie à filmer il peut s'en sortir, quand c'est un Nero débutant et un script vide, on ne peut plus faire grand chose pour lui.
Ici il tâcheronne gaiement, entre une caméra qui gigote et se prend le soleil en pleine poire, des zooms et dé-zooms dégueulasses dans un flash-back torché, et des ralentis bourrins à sang orange qu'une parodie n'oserait pas. Il n'est pas toujours aidé par un Morricone inégal, dégoulinant dans la tendresse, mais toujours efficace sur les chevaux, et la mort. Il est encore moins aidé par un budget figurants qui n'a permis de peupler le village que d'un épicier-juge-de-paix et quatre putes.
Néanmoins le film fonctionne, pas mal grâce à la neige, il faut bien le dire. Un peu grâce à Trintignant, ici bien beau, et nous épargnant son principal défaut tant grâce à la langue originale du film que grâce à la spécificité de son rôle. Surtout grâce à Kinski, tellement paradigmatiquement crapuleux qu'on oublie quels autres acteurs ont jamais pu jouer des salauds avant lui (et ce ne sont pas les affreuses boucles que notre Sergio colle à Palance dans le Mercenaire qui nous aideront à nous en souvenir). Son doubleur italien colle parfaitement à sa perversité veule et son accoutrement renforce par son ridicule l'effroi qu'il inspire.
Si on ajoute une amoureuse fort jolie malgré des yeux trop grands, des cheveux trop lisses et un deuil trop court, et un sheriff et sa Marisa Merlini trop peu utilisés mais assez attachants, cela donne même un assez un bon film, dans un sous-genre national qui, de toute façon, n'a vocation à subsumer ni son genre, ni sa nation.