La fin d’un monde
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Le Guépard de Visconti, immense classique du cinéma italien se révèle admirable en bien des points.
Tout d'abord, le film nous plonge dans une période troublée de l'histoire de l'Italie. Visconti choisit de nous montrer peu après le début du film une séquence de combats armés dans les rues de la ville entre les troupes révolutionnaires et celles qui essayent de leur résister. Le contexte est mis en place, ce qui permet au spectateur d'être réellement plongé en immersion dans cette période délicate que nous allons traverser le temps d'un film sous l'angle d'une famille de l'ancienne aristocratie qui va tenter de conserver son mode de vie. Oui car pour finir, on s'attardera presque uniquement sur le sort de cette famille aristocratique et plus vraiment sur ce qui se passe à l'extérieur de celle-ci.
Les multiples réflexions qui surviennent à mesure que le film se déploie sont intéressantes puisqu'on a le droit à un personnage particulièrement marquant (qui crève l'écran on peut le dire), celui du père de la famille, pris entre deux mondes, celui du passé dans lequel il avait une place définie et stable, et celui qui s'annonce. Ce nouveau monde qui émerge est inévitable, la roue de l'histoire lui fait face. Mais ce qui est intéressant, c'est que Visconti nous montre à travers l'histoire de ce personnage une manière de constater l'évolution de la société. On passe d'une aristocratie de privilèges avec un certain sens de la famille (pour ce qui est de celle-ci en tout cas) à une bourgeoisie naissante et puissante, qui finalement, va réinstaurer un même système de domination sociale mais qui cette fois, va se déprendre de l'attachement à la famille. On arrive dans une ère où le carriérisme bat son plein, ce qui ne manquera pas de rendre nostalgique notre cher Fabrizio Salina, ô combien bouleversant.
En effet, il faut dire un mot de ce personnage fascinant puisqu'il est véritablement la plaque tournante du film (la relation entre Delon et Cardinale étant vraiment très secondaire et tant mieux). On sent l'inquiétude et la détresse de la situation dans laquelle il se trouve, et c'est profondément touchant comment cela est mis en scène progressivement par le talent hors pair de Visconti. C'est un homme qui finira par ressentir le poids de la vieillesse sur la fin et constatera impuissant l'émergence de ce nouveau monde que même son neveu a appris à aimer et désirer, en somme, un monde où le sens de la famille est moins important que la carrière et l'opportunité personnelle face à des situations favorables. Tout ceci nous vaudra un ultime déchirement intérieur, en s'adressant à Dieu, dans l'ultime scène de ce chef-d'œuvre.
Burt Lancaster est formidable, rien à dire, il m'a épaté. Il surclasse vraiment tous les autres personnages tant il vampirise l'attention du film presque uniquement sur sa propre personne. Alain Delon tient également bien son rôle. Seule Claudia Cardinale apparaît comme étant décevante sur de nombreuses scènes où on aurait attendu plus d'elle compte tenu de la puissance artistique qui se dégage d'un tel film. J'ai finalement l'impression que seul Sergio Leone a réussi à bien la diriger car dans ce film, on sent qu'elle n'a été choisie que pour sa beauté et c'est bien dommage car on aurait pu associer beauté et prestance dans le jeu d'acteur.
Concernant l'aspect technique du film, on a le droit à de très beaux décors avec des plans sympathiques dont certains restent mémorables. La mise en scène est soignée, et la retranscription historique est magnifique à l'écran. On a également la présence d'une musique toujours très plaisante puisqu'elle est utilisée avec justesse et habileté.
La séquence de la fête à la fin du film est particulièrement marquante, et notamment la scène de danse entre Fabrizio et Angelica où l'on associe beaucoup d'ingrédients en même temps qui ont fonctionné dans le film, comme l'intensité dans les regards entre les personnages, la mise en scène méticuleuse, magique et la musique.
Le Guépard est un film plutôt lent en termes de rythme mais finalement pas désagréable du tout pour ce qu'il nous montre car il y a un certain souffle et une telle intelligence dans le découpage du film que l'on n'a pas l'impression de lourdeur, on est emporté dans ce qu'il nous montre.
En revanche, si vous n'entrez pas du tout dans l'histoire de Fabrizio Salina, il y a fort à parier que le film vous semblera profondément ennuyeux et je pourrais éventuellement le comprendre.
Me concernant, je me suis totalement pris à son histoire et j'ai été touché par sa sensibilité face à l'évolution de ce monde que l'on vit en grande partie à travers son regard et sa conscience.
Pour toutes les raisons citées précédemment, ce film n'a aucunement usurpé sa réputation de classique italien incontournable.
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Créée
le 13 janv. 2021
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