Une véritable Odyssée au côté de One Eye, l'homme muet en quête de liberté et Are un enfant esclave comme lui qui deviendra sa voix.
Je ne connais pas grand chose aux religions nordiques si ce n'est les quelques stéréotypes et autre infos à moitié vraies que je tire de films, séries, etc...
Par contre ce que je connais c'est la théologie chrétienne et ce film est truffé de références (dont certaine sont peut être involontaires) à cette dernière. La plus frappante et pourtant la plus ambigüe est la figure de One Eye, le protagoniste, représentant du paganisme avec ses tatouage, et surtout son oeil borgne qui évoque Thor. On l'assimile tout le long du film au païen par opposition aux autres personnages qui eux (sauf Are) sont tous chrétiens. One Eye sera d'abord le symbole de tout ce qu'il y a de plus viking, mais peut à peut dans ses aspect les plus mystiques il va revêtir une dimension christique
Ce film aurait pu vite m'ennuyer si je n'avais pas été occupé à essayer de le déchiffrer à chaque instant. Nicolas Winding Refn prend le parti d'un film silencieux et contemplatif, tout le long de l’œuvre c'est surtout les images qui vont guider le récit au travers d'une nature austère dépourvue de toute constructions humaine (ça change) et de montages psychédéliques.
Je n'ai pas l'envie d'en dire trop si ce n'est que c'est un film qui s'éprouve au côté de ses protagonistes, dans sa lenteur, dans le brouillard, avec un cadrage qui ne nous laisse pas souvent respirer, avec des couleurs dé-saturées rendant le film très désertique, mais cette traversée du désert en vaut la peine si vous êtes en quête d'un cinéma transcendantale, qui cherchera à vous porter au delà des frontière visibles.
Pour moi ce film est clairement une lecture critique de l'Eglise et de sa psychologie. One eye va faire la rencontre d'une troupe de viking convertis au christianisme qui ont décidé de se rendre en terre sainte pour reconquérir Jérusalem. Chaque personnage s'articule autour de motifs différents dans sa quête (rédemption, avarice, ambition) certains sont plus sincères que d'autre mais tous vont vivre ensemble les même épreuves dans leur croisade.
L'épisode du bateau me rappel l'histoire de Jonas. l'équipage a peur du brouillard et de l’absence de vent, pensant que c'est une malédiction qui finira par les tuer, ils pense que c'est l'enfant qui accompagne One Eye qui en est la cause est décide de le tuer, contrairement au récit biblique où Jonas se dénonce lui même et propose d'être jeté par dessus bord pour échapper au devoir que Dieu lui a confié, là One Eye prend la défense du plus faible. Il finira même par s'imposer comme une figure salutaire à la fin en étant celui par qui l'eau douce parviendra à l'équipage.
Plus tard grosse révélation, on découvre qu'ils sont en fait arrivé en Amérique, chacun va le vivre comme une forme d'enfer et chacun aura sa propre réponse à la souffrance qui lui est imposée: la folie, (ou même la folie religieuse pour le chef de l'expédition qui rêvera d'instauré sa nouvelle Jérusalem en Amérique) la fidélité dans les épreuves, le dénis de l'existence de Dieu, etc... c'est vraiment selon moi le passage le plus intéressant car on voit le comportement de chacun, qui garde son calme, qui se laisse aller à ses penchant les plus sombre, etc...
Puis pour finir dans la partie final du film il y a un moment de libération qui se ressent dans la mise en scène, on arrive en haut d'une montagne, enfin on a une vision dégagée, le visage de One Eye se confond avec le soleil, il y a à ce moment là une référence à la transfiguration selon moi. Puis à la toute fin une forme de sacrifice christique, un peu classique, on meurt en renonçant à la violence pour sauver les autres.
Le film est visuellement très intriguant et plutôt original à la fois dans son scénario et dans son propos, ça n'a pas la puissance lyrique ni la profondeur d'un 7e sceau néanmoins l’œuvre aborde la condition de l'homme dans sa recherche du divin en mettant le doigt sur ses vices, tout en soulignant ses vertus. Néanmoins le film reste ancré dans une forme de nihilisme propre à son époque (ou à son réalisateur ?) qui l'empêche de toucher du doigt la véritable profondeur du sacrifice et de la Grâce.