Le voyage de Bilbon s'annonce long
[ Critique publiée sur le site www.leberry.fr ] C'est le film de cette fin d'année. Neuf ans après Le retour du roi, Peter Jackson nous replonge dans le monde du Seigneur des anneaux. Après les aventures de Frodon, au tour de celles de son oncle, Bilbon. Voici notre critique du film Le Hobbit : un voyage inattendu. Garantie sans spoil.
La trilogie du Seigneur des anneaux a marqué l'histoire du cinéma. Aujourd'hui, Peter Jackson remet le couvert avec une nouvelle trilogie. Ce premier volet donne quelques espoirs, mais suscite aussi de nombreuses craintes.
On a aimé :
La 3D : Si Peter Jackson a d'ores et déjà gagné un pari, c'est celui de la 3D. Entre 2001 et 2003, la trilogie du Seigneur des anneaux nous émerveillait par la qualité de ses décors et paysages, tous plus magnifiques les uns que les autres. Aujourd'hui, la 3D permet de sublimer ce Voyage inattendu. Quelle claque ! Les mordus de la troisième dimension ne jurent que par Avatar. Mais suivre les péripéties de Bilbon, c'est quand même autre chose. Bien sûr, Jackson rajoute des effets pour amplifier l'importance de la 3D (fumée, accumulation de plusieurs éléments de décor sur un même plan, action tournée vers le spectateur, etc.), mais ça marche.
Le souffle épique : Attention, nous ne parlons ici que du dernier tiers du film. Quand le réalisateur et l'histoire tirent dans le même sens, ça fait mouche. L'action va crescendo jusqu'à la fin du Voyage inattendu et donne lieu à des combats plaisants. Le retour du précieux Gollum n'est d'ailleurs pas étranger à cette accélération du rythme. Le personnage, emblématique dans le Seigneur des anneaux, donne à ce premier volet ses meilleures scènes. À la fois violent, attachant, fou, ambigu, mesquin, mais aussi émouvant. Un vrai plaisir de le retrouver.
On n'a pas aimé :
Le rythme : Peter Jackson est-il trop gourmand ? Adapter les aventures de Bilbon en trilogie, c'est tirer sur la corde. Là où chacun des trois volets du Seigneur des anneaux avait son propre livre, Le Hobbit n'en compte qu'un seul. Du coup, on frôle la baisse de rythme au détour de nombreuses scènes. Un voyage inattendu dure 2 h 45, tout de même ! De nombreuses scènes sont dispensables. Inutiles, diront les plus sévères. Et l'intrigue en souffre. Après une heure et demi de film, nous n'avons pas l'impression que l'histoire a avancé de manière significative.
Les nains : Un gros point faible. Ou plutôt treize, en fait : les nains qui participent au voyage. Thorin, leur chef, a du caractère, mais est à mille lieues de la forte personnalité d'Aragorn. Quant aux autres... Jackson ne prend pas le temps de présenter ces nains qui sont au cœur de l'histoire. Nous les suivons, nous ne nous attachons pas à eux. Car ce sont des nains bourrés de clichés. Ils ne sont pas bêtes, mais très bêtes, et avancent ensemble sans se mettre en valeur. On regrette Merry, Pippin et Sam Gamegie.
De plus, pour Peter Jackson, la difficulté est de composer avec une histoire sans véritable guerrier. Pas d'Aragorn, de Legolas ou de Boromir dans les parages. Le personnage de Bilbon, lui, amène quelques interrogations. Attachant, joué par un excellent Martin Freeman, il ne parvient néanmoins pas à se détacher de la progression qu'a connu Frodon dans Le Seigneur des anneaux. Pour Bilbon, comme c'était le cas pour Frodon, l'aventure qu'il vit est d'abord l'occasion d'un parcours initiatique, d'une recherche d'identité. Sans surprise. Un arrière-goût de copié/collé. La bonne surprise vient de Gandalf, toujours joué par Sir Ian Mckellen. Il retrouve la force et la sagesse qu'on lui connaît et devient, au fil des scènes, le personnage principal du long-métrage.
La soundtrack : Ah, les thèmes du Seigneur des anneaux ! Magiques, puissants, dantesques. Le génialissime Howard Shore, déjà derrière la bande orginale de la première trilogie, est toujours de la partie. Avec quelle philosophie ? On ne sait pas vraiment. Les thèmes du Voyage inattendu sont beaux, nombreux... mais on les connaît par cœur. Son travail ne ressort pas suffisamment et nous avons juste l'impression qu'il a répété, à la note près, les morceaux du Seigneur des anneaux.
Après ce premier volet, nous sommes très mitigés. Certes, renouer avec le monde des Hobbit est une joie, des personnages que nous connaissons bien sont de la partie, et il y a quelques promesses pour la suite des aventures de Bilbon. Mais, déjà, on flirte avec l'ennui, et ce premier volet manque cruellement d'identité propre. Nous ne regardons pas Le Hobbit : un voyage inattendu, mais le préquel du Seigneur des anneaux. Peter Jackson s'entête à vouloir une nouvelle trilogie, le challenge est très relevé. Pas sûr qu'il y arrive. Le voyage de Bilbon s'annonce long.