Disponible dans la ‘Sélection du mois’ de la Cinetek, la comédie de Marie-Claude Treilhou est une belle découverte. Injustement méconnu, le film est d’une grande finesse et d’une très bonne qualité d’exécution. L’ensemble est drôle, fin et remarquablement interprété.
Trois sœurs se réunissent tous les dimanches. Suzanne, l'aînée, supporte difficilement son mari Georges. Germaine, célibataire, habite dans une maison de retraite. Armande mène une vie tranquille avec son époux Albert. Le dimanche de l'Épiphanie, le programme est chargé : passer au cimetière, déjeuner au restaurant chinois, manger la galette et tirer les rois, et aller voir une troupe comique du troisième âge dans laquelle joue la quatrième sœur marginale, Marie-Louise.
La ‘Sélection du mois’ de la Cinetek est consacrée cette fois au réjouissant thème de la fin de vie. Pourtant, on peut découvrir jusqu’au 09 avril une petite pépite de comédie. Et franchement, il est assez rare de voir une bonne comédie autour de ce thème, qui nous offre habituellement de sinistres variations autour de la décrépitude. Le film n’est d’ailleurs pas qu’une comédie et offre également quelques scènes émouvantes.
Marie-Claude Treilhou montre très bien la vie de ces trois seniors. Il y a la solitaire qui vit en maison de retraite, celle qui mène une vie pépère dans une maison de banlieue. Et puis il y a celle qui doit supporter un mari odieux et pour laquelle cette journée des rois sera un échappatoire. Un échappatoire mouvementé, cependant. Il faut dire que la première scène est assez saisissante car il est rare de voir sur les écrans les crises conjugales d’un couple sénior, les disputes de couple semblant souvent réservées aux quinquagénaires. Il y a par ailleurs une vraie justesse dans la peinture des caractères des trois sœurs. Il y a celle qui ne supporte pas ce qui dépasse, celle qui est rangée, celle qui semble n’avoir que des regrets. Et puis, il y a la quatrième sœur que l’on aperçoit brièvement à la fin et qui est plus bohème.
Comme l’indique le titre du film, il se passe le jour de l’Epiphanie. Marie-Claude Treilhou respecte et use parfaitement de l’unité de temps. Le film est constitué d’une succession de longues scènes dans le cimetière, au restaurant chinois, dans le salon, autour de la table à manger, dans la salle de spectacle. La réalisatrice étire volontairement ses scènes pour donner libre cours aux interprètes féminines.
La comédie est très réussie. L’humour repose principalement sur le comique de caractères et sur les contrastes entre les trois personnalités différentes. Les dialogues sont finement écrit, comme ce débat enflammé et hilarant autour de l’immaculée conception. Mais on n’est pas dans le gag facile, gratuit. Il y a de la profondeur, de l’intelligence dans les répliques. J’ai également beaucoup aimé la scène au restaurant chinois où les trois sœurs, en parfaites gamines, se moquent d’un chinois qui chante ‘La vie en rose’ de Piaf. Car le film n’est pas tout à fait aimable. Et c’est ce que j’ai vu de plus drôle ces derniers temps.
Si le film est d’une très bonne facture, le film doit tout aux trois actrices qui sont exceptionnelles. Dans un double rôle, Micheline Presle dévoile sa grande virtuosité, interprétant aussi bien la fantaisie que l’aigreur. Danielle Darrieux a une immense présence. Et puis, il y a Paulette Dubost, la moins identifiée des trois. Elle a pourtant joué dans ‘La règle du jeu’ de Renoir et dans ‘Le dernier métro’ de Truffaut. Ce trio fait mouche et est pour beaucoup dans la réussite du film.