Bouvier, ancien sergent dans l'armée ayant séjourné à l'asile, se retrouve vagabond dans la France du XIX°siècle. Comme tous les vagabonds, il vagabonde, mais pas que ça. Frappadingue sur les bords, il tue, mutile et sodomise des jeunes bergères (ou berger, Le Bouvier n'est pas sectaire) au gré de ses pérégrinations. Et vu que le bougre se déplace tout le temps, il n'est jamais inquiété par la police, qui ne fait même pas le lien entre les différents meurtres.
Mais un juge nommé Rousseau lui a fait le lien. Il a défini le parcours de Bouvier, dressé son profil psychologique, il en a même fait un portrait-robot avec les différents témoignages qu'il a relevé. Il a croisé les éléments communs de tous les meurtres, prémices des méthodes d'enquêtes actuelles. Il veut le confondre, mais aussi le faire avouer, pour donner de l'élan à sa carrière.
Il va donc se jouer entre les deux protagonistes un jeu psychologique ou le juge va tenter de gagner la confiance de l'assassin pour arriver à ses fins.
Le tout est bien entendu très fortement inspiré d'une histoire vraie.
Pour choisir le film que je vais regarder à la télé, j'ai tendance à aller voir la note de mes éclaireurs sur SensCritique sans en lire les critiques. Diantre ! Je n'y ai vu que des 8/10 !
Le film est effectivement très bien réalisé. Mais plus que sa réalisation, je l'ai trouvé superbement interprété. Galabru est incroyable en vagabond psychopathe, tantôt sympathique, tantôt amusant, tantôt effrayant. Et une preuve de plus que cet acteur a été sous-utilisé durant sa carrière au cinéma (moins le cas au théâtre). Noiret est très bon, mais a-t-il déjà été mauvais ? Et cerise sur le gâteau, on a un Jean-Claude Brialy qui interprète magnifiquement un magistrat royaliste, intelligent, fin et cynique revenu de Cochinchine par obligation. Et là on se dit qu'il aurait pu faire une bien plus belle carrière d'acteur s’il n'avait pas choisi d'être le dandy homo mondain du showbiz Français, et c'est bien dommage.
Donc, un film unanimement apprécié par mes éclaireurs, avec une très bonne réalisation, une interprétation parfaite....et pourtant....une fois le générique de fin passé....
....ben j'ai un goût de merde dans la bouche.
Une fois le générique de fin terminé, j'ai repassé le film dans ma tête.
Et ce Bouvier, magnifiquement interprété par Galabru, ce tueur en série, qui a massacré des jeunes filles, a mutilé leur corps et a sodomisé leurs cadavres, on n’aurait pas essayé de nous le faire passer pour sympathique ? De nous expliquer que finalement, c'est pas vraiment sa faute ? Que c'est une victime de la société ?
Et ce juge Rousseau interprété par Noiret, on n’essayerait pas de nous le faire passer pour une ordure carriériste, manipulateur et antipathique. Quasiment aussi coupable que Bouvier ?
Voilà, j'ai mis le doigt dessus. Au lieu de nous faire un excellent thriller psychologique basé sur le premier tueur en série Français reconnu, on nous a fait un film de propagande de gauche à base de moraline.
Tout y est, mais vraiment tout.
Les bourgeois et le riches sont tous des ordures :
• On a le juge cynique, manipulateur et carriériste (oui dans l'esprit de gauche, faire carrière c'est mal. En tout cas c'est mal de le dire), qui manipule notre pauvre tueur en série pour le confondre alors qu'il est aussi tout aussi coupable que lui ! (oui oui, il l'est, me demandez pas de me justifier). Il violera même l'ouvrière qu'il a pris sous son aile (il l'a acheté comme une esclave le salaud) pour bien montrer qu'il ne vaut pas mieux que le tueur.
• Sa mère, la bourgeoise cruelle qui refuse un bol de soupe à un pauvre parce qu'il ne sait pas écrire et ne peut donc pas signer la pétition anti Dreyfus (qu'elle est sans cœur)
• Le magistrat de Cochinchine, royaliste, qui a ramené un petit esclave avec lui (dont on imagine aisément qu'il en abuse sexuellement, ben oui, pour bien appuyer que un riche ne vaut forcément pas mieux qu'un tueur et violeur en série pauvre)
• Le colonel Baryton qui est un héros de l'Algérie parce qu'il a tué par une méthode cruelle une centaine de pauvres Arabes (ben oui, la France est allée en Algérie dans le seul but de tuer et torturer des Arabes, on leur doit bien un visa. Quoi ? C'était pour lutter contre le piratage en méditerranée que les tribus Algérienne pratiquait allègrement après le retrait de la région de l'empire Ottoman ? Mais non, on vous dit que c'était par pure cruauté envers les Arabes ! Ecoutez un peu !
• Bien entendu tous les riches et bourgeois sont fortement antisémites, anti-démocrates (on se demande même comment à ce niveau la III° République a fait pour exister) et au mieux méprisent les classes populaires ou s'en servent pour assouvir leur bas instinct.
• Et bien sûr, c'est bien connu, ils sont tous antidreyfusard vu qu'ils sont antisémites (seul le Français riche est antisémite)
Les pauvres eux, c'est pas pareil. Ils sont tous de gentilles victimes.
• La maitresse (incarnée fadement Isabelle Huppert) est une ouvrière qui a été sortie de sa condition par le juge. Mais la pauvre regrette d'avoir été privée de son boulot de merde et de ses camarades.
• Les pauvres sont les victimes du système judiciaire, et même quand ils sont blanchi, on leur refuse la rédemption
• Les pauvres recueillent les vagabond, partagent avec eux le peu qu'ils ont et refusent leur argent. Parce que le pauvre a bon cœur, il est solidaire, et il n'attend rien en retour
• Les pauvres refusent de signer la pétition anti-Dreyfusard parce que le pauvre, lui, il n'est pas antisémite. Et il est droit dans ses bottes.
Même notre tueur en série, qui pourtant a massacré, mutilé et violé des jeunes filles et un jeune homme, vu qu'il est pauvre, il ne peut pas être foncièrement méchant. Ben non voyons, c'est une victime du système. Et les vrais coupables ce sont ces méchants riches qui alimentent ce système et qui ne valent pas mieux que lui.
Parce qu'on a l'impression que c'est nouveau, mais non. Depuis toujours la gauche marxiste a eu besoin de ses damnés de la terre pour se donner bonne conscience. Et depuis toujours elle est prête à leur trouver toutes les excuses et les déresponsabiliser de leurs turpitudes, dans le but secret que eux-mêmes n'aient pas à assumer les leurs.
Donc, notre tueur en série n'est pas déclaré fou, donc responsable de ses actes (quelle injustice) parce qu'il a été manipulé par le méchant juge riche. Et il finira à la guillotine.
Et plus c'est gros plus ça passe, la population en veut au juge !!! Mais oui !!
Vous n’allez pas me faire croire que la population au XIX° siècle allait avoir pitié d'un mec qui a tué et violé une vingtaine de jeune prépubères, par simple solidarité de classe sociale. D'ailleurs, quand Dutroux, qui avait lui aussi sans aucun doute un grain, a été arrêté, je ne me rappelle pas de manifestation populaire de soutien à sa personne parce que c'était une victime de la société.
Au cas où vous auriez pas encore compris le message, on va agrémenter le film de populace brandissant le drapeau rouge, de chants révolutionnaires de la commune, et d'une dernière scène ou les gendarmes vont faire feu sur une grève ouvrière (Faudrait m'expliquer le rapport avec notre sympathique tueur violeur) ou se trouve la maitresse du juge, mais ou lui, méchant comme il est, estime que ce n'est pas son affaire.
Là tu te dis que les mecs se sont surpassés. Mais non. Ils en avaient encore sous le pied. Et avant le générique, on te sort un texte sur fond noir t'expliquant que Bouvier a été condamné à mort pour le meurtre et le viol d'une vingtaine d'adolescents....mais que la même année, 2 500 enfants ouvrier sont morts dans les usines Françaises....
Mais c'est quoi cette comparaison totalement what's the fuck ??
Tu veux faire un film sur la lutte des classes, la condition ouvrière au XIX° siècle, le travail des enfants ? Ben tu fais une adaptation de Germinal.
Mais comment tu peux comparer, le meurtre et le viol d'une vingtaine de jeune gens par un pauvre type avec la mort des enfants ouvrier dans les usines du XIX° siècle ? Donc le meurtre et le viol d'une vingtaine de jeunes, c'est pas si grave finalement ? C'est justifiable ? C'est injuste de condamner ce type alors que les riches et la société capitaliste sont les vrais méchants ?
Non, l'un n'excuse pas l'autre, ni ne le justifie.
Cette culture de l'excuse et de la déresponsabilisation et ce relativisme sont à gerber.
On a donc une histoire originale avec un tueur en série ayant réellement existé et bien de chez nous. Un réalisateur de talent. Un casting de folie avec des prestations formidables. Tous les ingrédients réunis pour faire un magnifique thriller psychologique à la Française.
Mais voilà, on est juste après mai 68. Et le cinéma Français a déjà pris l'habitude, quand il avait de l'or entre les mains, de le transformer en un tas de merde.
Il ne peut pas s'empêcher de glisser sa moraline à la mords-moi-le-nœud dans n'importe quel film, pour s'enorgueillir d'être un gentil et s'élever au-dessus de la masse en donneur de leçon de moral.
Le jeu des acteurs est vraiment fabuleux et j'allais mettre un 6/10, sans doute aussi influencé par mes éclaireurs.
Puis j'ai eu cet arrière-goût de merde dans la bouche qui m'a fait passer la note à 5 sans trop savoir d’où ça venait tellement c'était bien joué.
Puis en me repassant le film dans la tête pour écrire cette critique, je me rends compte finalement que tout a été gâché et qu'on se retrouve devant un vulgaire film de propagande moraliste, et je descends ma note à 3/10.
Et si je ne mets pas 1/10, c'est parce que c'est vraiment bien réalisé et superbement interprété. Mais quel gâchis.