Les deux font la paire

Force est de constater qu'on ne réussit pas à tous les coups un film comique même avec le même acteur.

Par exemple, "Le grand blond avec une chaussure noire" et sa suite font partie de ma galerie personnelle de films qui me font rire chaque fois que je les regarde.

Pourtant j'ai beaucoup de tendresse pour ce cinéaste, scénariste et acteur, Yves Robert, car il a fait ou participé à des films inoubliables, comiques ou tragiques. En tant qu'acteur, il a souvent été un second rôle épatant (cet adjectif me semble bien résumer Yves Robert acteur).

Le scénario est pourtant brillant. Il est tiré d'un roman américain que je ne connais pas. L'histoire est assez astucieuse avec la mise en scène de jumelles et de jumeaux. Même si on devine vite que le personnage interprété par Pierre Richard qui semble très doué pour attirer à lui les femmes, belles de surcroît, va finir par plonger dans un joli sac d'embrouilles.

D'un côté, jongler avec deux femmes (voire même trois ou quatre) en jouant deux personnages différents, demande de l'adresse et une bonne forme mentale et physique. Y compris pour le tournage.

D'un autre côté, Yves Robert se piège un peu lui-même dans le comique de répétition ou du quiproquo qui finit par s'étirer un peu et parfois devenir un peu lassant. Et ce comique de répétition ou de quiproquo est inévitable puisqu'il s'agit de vrais jumeaux et jumelles vivant ensemble et dissimulant, par force, leur identité.

Irai-je jusqu'à dire qu'Yves Robert nous fait plonger dans la métaphysique pure lorsqu'une des jumelles ayant goûté aux deux Pierre Richard le fait plonger dans un abîme insondable de perplexité lorsqu'elle lui avoue comme cri du cœur, après une scène torride : "tu es mieux que ton frère" …

Côté casting, je ne reviens pas sur Pierre Richard en patron à l'arrache, fauché et play-boy. Un mot sur les deux vraies jumelles interprétées par les anglaises Camilia et Carey More, dans un rôle de riches héritières. Elles sont plutôt bluffantes dans leur ressemblance et craquantes avec leur accent anglais assez prononcé.

Quelques seconds rôles de talent avec Jean-Pierre Kalfon en avocat véreux et Andrea Ferreol en secrétaire, bonne à tout faire de Pierre Richard. Ou un peu plus rares, Jean-Pierre Castaldi et Paul Le Person en clodo féru de calcul d'intérêts composés.

À mon avis, c'est peut-être là que le caractère comique du film aurait pu être singulièrement amélioré. En équilibrant ou étoffant un peu plus les personnages de ces seconds rôles et en rognant sur l'omniprésence de Pierre Richard.

La musique est très agréable avec notamment la belle trompette, bien reconnaissable, de Chet Baker.

Au final, on a un film qui reste intéressant, avec un scénario astucieux, où on voit surtout Pierre Richard mouiller sa chemise. Ça se regarde sans déplaisir (ne serait-ce que les sœurs More). Il ne faut pas s'attendre cependant à rire à gorge déployée. Tout au plus, on sourit devant quelques gags.