Pour certains, il s’agit d’un pari réussi, enchanteur et poétique. Pour d’autres, c’est une production risible et ratée. Alors, Le Labyrinthe de Pan nous transporte-t-il dans un univers grandiose ou se perd-il entre réalisme historique et escroquerie fantastique ?
Ce n’est pas pour rien que Le Labyrinthe de Pan a remporté l’Oscar des meilleurs décors ainsi que nombre de distinctions pour ses effets visuels. Le film nous plonge dans un univers à la fois sombre et magique, porté par des effets spéciaux très bien maîtrisés, d’autant plus impressionnants que pour la plupart réalisés avec masques et maquillage. Du faune immense à la créature livide aux yeux sanglants incrustés dans ses paumes, les créatures rencontrées ne sont pas belles, mais possèdent une présence et un impact indéniables. Certaines scènes glaçantes, on pense notamment à la salle du banquet, sont réussies grâce à ces effets visuels forts qui dessinent un monde de conte de fée à l’ambiance inquiétante.
Cependant, quelque chose dans ce monde nous a empêché d’être totalement sous le charme. A qui est donc destiné ce film ? Qualifié de “conte de fée pour adultes”, l’avertissement moins de 12 ans se justifiant par la violence fasciste (ce sont eux les véritables monstres !), le film souffre pourtant d’un fort manichéisme digne d’un dessin animé pour enfants. Le méchant est très méchant pour être méchant parce qu’il est méchant. Les créatures malfaisantes remplissent à merveille leur rôle : faire peur. Pourquoi ? Juste pour faire peur, ça ne va pas plus loin. L’héroïne est quant à elle jeune, innocente, naïve, impuissante… et surtout exaspérante ! Son attitude niaise (peut-être mignonne chez un bambin en couche-culotte mais presque pathétique chez une jeune fille de 12 ans) et égoïste nous empêche de nous identifier à elle et parfois même de ressentir une quelconque empathie.
On peut tout de même se dire qu'Ofelia dresse son innocence comme un rempart entre elle et la réalité, pour se protéger de la violence fasciste. La frontière entre réel et surnaturel est mince, mais on peut supposer que l’aventure vécue par la jeune fille n’est qu’une invention de son esprit, un moyen de fuir la réalité par l’imaginaire. En ce sens, le film montre comment la pureté de l’enfance est aveugle aux apparences et voit le beau là où on ne l’attend pas (une fée dans un phasme immense et métallique). A aucun moment elle ne repousse les créatures les moins séduisantes sous prétexte qu’elles sont laides ou effrayantes.
Mais cette frontière entre réel et imaginaire pose aussi un problème : le film part avec un potentiel assez élevé, mais laisse au final un goût de trop peu. Le monde fantastique dont il est question plus haut promet tout un univers souterrain et magique dont nous n’entrevoyons que la surface. On aurait d’autant plus aimé voir davantage de ce “labyrinthe chimérique” (d’ailleurs quel rapport entre l’intrigue et un labyrinthe ? et Pan ?) qu’il est réussi ! Finalement, le film souffre de deux histoires parallèles qui se gênent, en ce sens que le réalisateur n’est pas parvenu à les faire totalement adhérer (et nous avec).
Sans parler de la dimension fantastique du film (qui est à admettre à partir du moment où on regarde un film du genre), de nombreuses incohérences nous ont sauté au yeux. Entre un général survivor insensible à la douleur qui OUPS SPOILER se fait poignarder dans le dos et le cœur - et encore je passe les détails - mais tient encore bien debout ; une gamine sourde à la plus élémentaire des prudences (si vous voyez de quel grain de raison je pense) et des in extremis plus que douteux, certains éléments ne sont tout simplement pas crédibles.
Alors certes j'ai vu ce film en VF (quelle idée de foutre un accent seulement au général), mais dans l'ensemble, le film ne m'a pas convaincue, m'a même énervée.