Alice au pays des Pervers

• Voir et revoir ce film est un régal.
  La première fois, l'intrigue fascine. Nous suivons les joutes cruelles entre deux hommes que tout oppose. Sir Andrew Wyke, écrivain célèbre de romans policiers, riche aristocrate et propriétaire d'un somptueux manoir (Laurence Olivier). Et Milo Tindle, coiffeur playboy d'origine italienne (Michael Caine).
  Pourquoi Sir Andrew Wyke propose-t-il au jeune Tindle de simuler un cambriolage ? Est-ce vraiment pour toucher l'assurance ? N'est-ce pas un piège ? Et pourquoi, malgré leurs rapports conflictuels, Tindle accepte-t-il si facilement ?

Revoir le film permet de savourer les dialogues brillants et l'interprétation de comédiens inoubliables. Impossible d'échapper à ce huis-clos théâtral, plein de rebondissements. La situation ludique initiale se métamorphose sans cesse. L'escroquerie à l'assurance vire à la parodie grotesque, puis dégénère en conflit ambigu, de plus en plus implacable. Du labyrinthe végétal du jardin aux dédales piégés du manoir, le duel grinçant, échevelé, entre un mari trompé et l'amant de sa femme, s'avère être une lutte au couteau.

La mise-en-scène de Mankiewicz, mécanisme d'horlogerie de haute précision, entraîne le spectateur dans un tourbillon. Mensonges et sous-entendus, automates ricaneurs, déguisements à répétition, jeux de pistes contre la montre, humiliations sur humiliations. Tout est bon pour dominer, se moquer avec férocité, punir et écraser l'autre. Les coups bas vicieux révèlent les névroses, misère sexuelle ou angoisse d'infériorité. Le scénario exceptionnel regorge d'imagination, d'inventions et de surprises.
Un chef-d'oeuvre cruel et génial : Alice au pays des Pervers.