Le Locataire par Charles Dubois

Le film de Polanski, résolument moderne, bluffe par sa mise en scène excellente (Polanski n'a rien à prouver à ce niveau là). Mais là où il surprend, c'est qu'il réussit plus dans ce qu'il n'entreprend pas forcément de développer.
En effet j'ai préféré Le Locataire qui traite d'un étranger dans une grande ville, que Le Locataire angoissant, qui à vrai dire m'a fait plus souvent rire que trembler (même si c'était certes un rire jaune, grinçant, sourcils froncés). Polanski acteur est ici touchant et surprenant dans ce rôle de looser magnifique. Maladroit, à tel point que c'en devient désespérant, définitivement seul, il s'isole dans sa solitude, sa forteresse dans laquelle on tente par tous les moyens de pénétrer.
Mais là où le film impressionne c'est non pas dans une angoisse ni dans une horreur que beaucoup lui voyait, mais dans cette idée de cauchemar éveillé. De cette idée onirique, Polanski tire les délires les plus fous (on retiendra surtout le travlo qui de sa fenêtre, regarde tous ses voisins en train de torturer et d'humilier les locataires récemment exclus) et fait de son film une sorte de Rush Hour Lynchéen.
Insupportable, irrespirable, exagérément étouffant, le film met mal à l'aise par cette grisaille malsaine qu'on a du mal à imaginer dans un film de cette époque. Intrusifs, obsédants, les personnages secondaires (même les plus infimes) sont tous richement écrits, donnant une vraie profondeur à ce film excellent, qu'on aurait aimé moins lent et plus angoissant.