Un beau petit court de 14 minutes, qui a le regard tourné vers les meilleures oeuvres du muet. Avec son personnage un peu dans la Lune, touchant et dans lequel on lit les émotions comme dans un livre ouvert sans besoin d'un seul mot, Le Malheur des autres nous fait songer aux courts d'Harold Lloyd, Buster Keaton voire Charlie Chaplin : il ne manquait que la fille à séduire, et on y était. On a vite cerné ce vieux monsieur seul comme un homme blessé, qui cherche la vie auprès de ceux qui sont malheureux, qui célèbrent la mort dans la douleur, mais un peu moins si le gentil papy leur offre une épaule pour pleurer. Les gags arrivent avec finesse (les incrustations aux enterrements, surtout dans des familles qui ne lui pas du tout connues comme celle d'origine asiatique où l'on devine qu'il ne comprend pas un mot de l'éloge chanté) et la course-poursuite avec le gardien du cimetière vient renouveler le récit juste au bon moment. On est un peu déçus, cependant, par la morosité de la fin, qui vient trop vite, et nous laisse sur un sentiment que le scénariste avait encore quelques bonnes idées à dégainer avant d'en arriver à ce final attristant. Jackie Berroyer est formidable de modestie dans le rôle de ce personnage muet qui attire vite toute notre sympathie. Un bel hommage (une exhumation symbolique plutôt qu'un enterrement, pour le coup !) à l'âge d'or du muet, tendre et poétique.