Quatrième film d'Elia Kazan (et troisième pour la seule année 1947), Le Mur Invisible nous fait suivre un journaliste se faisant passer pour un juif pendant huit semaines pour mieux enquêter sur l'antisémitisme.
Il paraît essentiel de contextualiser pour mieux approcher ce film, évoquant l'antisémitisme à tous les étages de la société américaine alors que la Shoah et les horreurs commises par le régime nazi étaient encore dans toutes les têtes. Kazan, qui n'avait guère une haute estime de ce film (il a déclaré "On aurait dit une illustration pour magazine. Tout le monde y était embelli"), l'oeuvre ayant plus été le projet du producteur Darryl F. Zanuck), montre ici à quel point il est ancré dans les mœurs américain et la façon dont, dans cette société, un juif se heurte à de nombreux murs invisibles.
C'est pourtant dans cette thématique, toujours d'actualités près de 70 ans après la sortie du film, que Kazan montre certaines limites. S'il met bien en avant un antisémitisme présent à tous les niveaux dans la société américaine, il n'offre jamais de réflexion, et surtout ne démontre que trop rarement une véritable intelligence dans la façon d'aborder ce sujet, se contentant de proposer une démonstration assez lourde et académique (ce qui était déjà bien le cas dans l'écriture, notamment les dialogues). Comme le dit si bien Kalopani : ""Gentleman's Agreement" se suit alors comme un message publicitaire contre l'antisémitisme, c'est-à-dire avec une relative indifférence.".
Là où l'oeuvre trouve un minimum son salut, c'est dans la description de son protagoniste, et le suivre dans son enquête permet à Kazan de rehausser l'intérêt, il tisse assez bien le lien entre lui et son entourage. Il en profite d'ailleurs pour égratigner la bourgeoisie américaine d'alors, et ce de manière plutôt réussie, tandis qu'il montre tout de même un minimum de savoir-faire derrière la caméra et il dirige plutôt bien ses interprètes, Gregory Peck en tête.
Darryl F. Zanuck, par l'intermédiaire d'Elia Kazan, propose un long sermon un peu trop lourd et redondant pour être réellement convaincant, et ni le savoir-faire du génial metteur en scène de Sur Les Quais, ni les comédiens, ne parviennent à réellement sauver le film.