Todd Haynes est l'un des metteurs en scène les plus singuliers, les plus littéralement extra-ordinaires qui soient en activité. Constamment à la recherche de solutions formelles originales, brassant les concepts les plus visionnaires et les associant à une sorte de nostalgie des formes passées, il nous propose des films systématiquement surprenants et stimulants... même si, au final, c'est lorsqu'il laisse pleinement s'exprimer les émotions que Haynes est le meilleur, et touche à la grandeur. Ce ne sera malheureusement pas le cas de ce "Musée des Merveilles", long et fastidieux pensum qui s'enlise dans le formalisme le plus stérile. Après une introduction stupéfiante, qui semble ignorer tous les codes narratifs du cinéma américain, et qui laisse présager une approche réellement avant-gardiste de la fiction,... rien ! Ou plutôt pas grand-chose, une sorte de vitrification des codes esthétiques de deux époques visitées en alternance / en parallèle, qui intéresse dix minutes, avant de lasser. Mais voilà, il reste ce damné dernier quart d'heure du film, où perce enfin l'émotion, pardon l'Emotion... principalement grâce à de merveilleuses maquettes qui justifient enfin le titre original du film, "Wonderstruck". D'où la question, pas si gratuite que cela : peut-on aimer un film pour quinze minutes merveilleuses ? J'ai envie de répondre "oui", parce que le genre de sensations que provoque la fin de ce "Musée des Merveilles" est rarissime. Alors, même après une demi-réussite comme celle-ci, nous continuerons à considérer Todd Haynes comme un artiste brillant.
PS : Merci aussi à Todd pour cette utilisation bouleversante de "Space Oddity"...
[Critique écrite en 2017]