Et une idée de départ très alléchante, une... Une enquête, des fausses pistes, des indices soigneusement égrenés que le spectateur ne voit pas forcément, de nombreux potentiels suspects, vivants ou morts, qui pourraient faire un bon coupable, un inspecteur, son acolyte, une révélation finale, un whodunit à la sauce Agatha... sauf qu'il n'y a pas de meurtre, qu'il n'y a donc pas de meurtrier, qu'il n'y a pas du tout de flic... Non, il s'agit juste de répondre à deux questions, est-ce que le propriétaire décédé d'une pizzeria est l'auteur d'un véritable chef-d'œuvre littéraire ou non ? Et si ce n'est pas lui, qui est-ce ? L'enquêteur n'est pas un flic, mais un critique littéraire, son acolyte n'est pas flic, mais est la fille du défunt peut-être écrivain...
Moi, j'achète tout de suite. D'autant plus, que ce sont Fabrice Luchini et Camille Cottin qui se chargent de jouer les deux rôles principaux, et qu'ils s'en sortent très bien (même si la dynamique de leur duo n'est pas toujours bien exploité, ce qui est loin d'être le seul souci de ce film, comme on va le voir par la suite !).
Problèmes (enfin, autres problèmes !) : il y a de nombreuses fautes de rythme dans tout cela, on a même un sacré ventre mou dans la partie centrale du film ; les personnages secondaires sont mal creusés (un whodunit sans personnages secondaires bien creusés, non mais, on va où ?) ; les seconds couteaux pour les incarner ne sont pas tous à la hauteur, mention spéciale à Alice Isaaz, visiblement peu à l'aise ; il aurait été bénéfique que la fin soit moins bâclée ; la réalisation du point technique est assez plate, pour ne pas employer le terme de téléfilmesque (et non, poser un vieux logo France 3 région et mettre quelques grésillements ne suffisent pas à donner l'allure d'un vieux reportage télévisuel !). Sans tout cela, on n'aurait pas eu, certes, un grand film, mais au moins un très bon film.
Ah oui, j'ajoute, aussi, que j'ai très modérément apprécié le fait qu'un pizzaiolo qui vit au fin fond d'une Bretagne pluvieuse ne puisse pas être vu comme un auteur de talent crédible. Ben oui, il est certain que seul le milieu "cultivé" parisien, d'un rang social élevé, évidemment (il ne faut pas déconner quand même !), a su donner de grands écrivains à la France.
Le grand film. On aurait pu l'avoir s'il y avait eu en prime une critique des milieux littéraires parisiens ; s'il y avait eu une opposition fine Paris/Province ; s'il y avait eu une véritable réflexion sur le rôle de la littérature dans nos vies, au lieu, juste, de quelques titres de livre énoncés de temps en temps (pourquoi ne pas fantasmer sur une véritable mise en parallèle pouchkinienne avec l'intrigue qui se déroule sous nos yeux !).
Non, en fait, on se contentera d'une bonne pointe de déception, vu les promesses de l'idée de départ et celles d'accompagner les deux acteurs principaux.