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L'essor de la psychanalyse a fait décidément bien du mal à Hollywood. Un certain nombre de réalisateurs ont utilisé ce ressort, avec plus ou moins de succès. Fritz Lang et son secret derrière la porte, Cukor avec Hantise, Hitchcock avec la maison du docteur Edwardes... Preminger décide à son tour de s'insinuer dans l'âme humaine avec le mystérieux docteur Korvo, charlatan de son état, aux capacités hypnotiques. Si l'on s'arrête à l'intrigue, une banale histoire d'escroquerie, le film tourne court assez vite. L'hypnose comme ressort du film noir est une facilité trop évidente, pour un public moderne d'autant plus, et manque d'intérêt.
Que l'on cherche un peu plus loin en revanche, d'un point de vue critique et un peu plus féministe, et on pourra apprécier les efforts de Preminger : une femme qui passe de la tutelle de son père à celle de son époux, qui se juge elle-même inférieure intellectuellement à ce dernier (soi-disant brillant psychologue), dévouée et passant ses journées à attendre que son mari rentre, moment où elle jouera la femme d'intérieur et l'épouse parfaites; un mari qui ne voit pas que sa femme plonge doucement mais sûrement dans la dépression et la kleptomanie; un escroc, plus fin psychologue, qui a su immédiatement déceler chez ces femmes au foyer l'ennui et l'abattement.
On assiste donc à une critique en règle de la société américaine post-guerre, où l'image de la parfaite femme au foyer américaine s'étale sur les pages des magazines (une sorte de Betty Draper cinématographique). L'époux attend tout de son épouse, doute immédiatement d'elle, même après huit ans de "mariage heureux", et finalement, propose de la soigner, s'excusant tout de même d'avoir empêché sa femme d'utiliser son argent à elle, comme si d'ailleurs c'était la seule et unique cause de son malheur. La morale de l'histoire est sauve malgré tout, l'épouse revient dans les bras de l'époux, sans même lui reprocher deux ou trois bricoles.
Nous sommes à la fin des années 40, on ne peut pas décemment demander à Preminger de faire un film comme "les noces rebelles" (lui même tiré d'un livre écrit seulement dans les années 60). Le film manque donc un peu d'audace critique, et reste assez mal mené en tant que film noir.
Reste un certain charme à voir Gene Tierney et José Ferrer (dont la suavité convient parfaitement au rôle) prendre un martini ensemble.
Un petit Preminger.
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Créée
le 7 juil. 2016
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