Terrence Malick n'est pas un produit formaté par les conventions actuelles, au contraire son émancipation publique traduit les intentions de l'homme d'être en retrait vis à vis d'elle. Au fil des années il a su se construire une fascination quasi mystique de la part de son public, n'hésitant pas à le diviser parfois; car le cinéma de Terrence Malick ne peut se résumer à de la redondance mais demande une implication toute personnel à son spectateur. Une œuvre comme "The Tree of Life" n'a pas pu ouvrir ma sensibilité à l'inverse de sa production antérieur qu'est "Le Nouveau Monde"; reprenant l'histoire de l'amérindienne Pocahontas, tout en y intégrant ses aspérités esthétiques et son ode à la nature.
Après la réussite de "La Ligne Rouge" en 1998, Malick réitère l'utilisation de la voix-off afin de créer une narration décentré accentuant l'aspect contemplatif des cadres, on y retrouve aussi ce travail très pictural et sonore si significatif, à l'instar des ressenties intériorisés des personnages et la multiplicité des points de vue. Mais c'est bien la relation centrale de l'histoire qui m'a le plus touché, au travers de ce couple impossible se détruisant au fur et à mesure que leur amour grandit, en effet l'ennemie principal devient la sensibilité naissante, incomprise par les deux civilisations qui ne peut que aboutir à un échec d'un métissage idéologique, traduit par la violence (à la fois omnisciente et distante) et l'inadaptation constante de cette princesse perdant au fur et à mesure de son identité, pour devenir esclave de sa passion.
La princesse devient en ce sens une personnification de cette nature vierge, bafoué par l'Homme. Car l'élément qui parcours la totalité de cette mise en scène romanesque, c'est bien évidemment la nature, magnifiée à chaque cadre et transmettant les émotions, les ressenties, la douleur ou la joie avec une efficacité rare. Cet embellissement perpétuel des lieux et des paysages constitue une vraie symphonie picturale accompagné d'une musique lancinante, portant une richesse à la fois troublante et fascinante.
On peut ne pas être réceptif à la multitude de détails offerte par les rimes visuelles, ou encore se sentir délaisser par un rythme volontairement lent, cependant je ne pense pas que l'on puisse ignorer le travail chirurgical réalisé par Terrence Malick, tant chaque plan est réfléchie pour transmettre une émotion forte et sincère. S'éloignant d'une naïveté facile pour servir un portrait accablant l'humain et son inexorable pulsion de contrôle, Terrence Malick signe une production belle et profonde; une vision contemplative de l'amour et magnifient chaque point de nature.