La grande lessive
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Le pacha est d'abord remarquable par son statut de film de transition, autant du style de Gérard Lautner que du polar français tout court, notamment à travers son ton et sa mise en scène. Celle-ci se fait sèche, particulièrement durant la préparation d'un (génial) casse, millimétré à la Melville, et dont les règlements de compte qui s'ensuivent sont dignes d'un poliziottesco par leur violence sans état d'âme. Finie la comédie et place donc à une nouvelle ère avec l'arrivée des ordinateurs (à nos yeux des vieilleries) pour les enquêtes et surtout des flics désabusés voulant rendre la pareille à ces voyous où la loyauté n'a plus lieu d'être, obnubilés par l'oseille pure et dure, ce qui est finalement la face sombre du cinéma de Lautner qui s'est souvent attelé à ce genre d'exercice de style opposant anciennes et nouvelles générations du milieu.
Le pacha est tout autant un film d'acteurs, avec en têtes de file Jean Gabin, excellent en vieux flic fatigué mais expérimenté au regard certes désabusé mais toujours vif et acéré, et André Pousse, également très bon en truand quasi mutique, perfectionniste et expéditif, dont l'incroyable regard déterminé et glacial est superbement mis en valeur par la caméra de Lautner. Des personnages/acteurs magnifiés par les dialogues aux petits oignons de Michel Audiard qui trouve toujours le bon mot pour insuffler un peu de légèreté dans ce monde de brutes.
Encore une fois, Lautner fait du bon boulot côté mise en scène, avec de multiples influences esthétiques (marquée entre autres par un intermède yéyé hallucinant qui renforce encore plus le décalage entre cette époque et celle de Gabin) parfaitement digérées, un solide sens du cadre, et un montage efficace insufflant un rythme haletant au métrage, bien que le Requiem pour des cons de Gainsbourg utilisé à toutes les sauces fonctionne plus ou moins bien selon les choix de placement, et que les affrontements, surtout quand trop de monde se met au balcon, tournent parfois un peu court. Je retiens enfin ce final enneigé aux airs funèbres qui assène un bon coup de marteau aux dernières traces de comédie qui pouvaient encore traîner.
Bref, Le pacha est une bobine aux nombreuses qualités, au fond certes classique de cache-cache entre un flic déterminé et un truand qui ne l'est pas moins, mais dont la modernité effrontée (on dirait du Dirty Harry avant l'heure dans la vision de la justice véhiculée) et l'alchimie formée par la réalisation, les acteurs et les dialogues, subliment la formule en inspirant un profond respect, le tout emballé avec une efficacité redoutable en 1h20 et des poussières.
Créée
le 15 mai 2017
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